La REFONDATION, c’est simple : on prend les MÊMES et on recommence

C’est dimanche. Crise énergétique, Conseil de défense, Refondation – partons en balade avec Macron ! (Attention, il n’est pas impossible qu’un peu d’ironie se cache dans ces lignes).

Je ne sais si l’on aura froid cet hiver par manque de gaz et d’électricité – la faute au Covid et à la guerre russe en Ukraine, et c’est tout (sic), d’après nos dirigeants. Mais l’on est d’ores et déjà saisi d’un tournis épouvantable par le seul fait de suivre les oscillations frénétiques du discours gouvernemental sur la question, entre rassurance pas très sereine sur les approvisionnements en énergie, alarmisme hyperbolique d’Emmanuel Macron et prétexte inespéré pour obtenir une baisse des émissions de CO2. Petit condensé des déclarations récentes :

Nous vivons la fin de l’abondance – mais il n’y aura pas de coupures de gaz pour les particuliers – mais si tout va vraiment très mal, il y en aura peut-être pour les entreprises – qui pourraient bien subir des rationnements si elles ne se rationnent pas toutes seules – et de toute façon, un peu de « sobriété » ne peut pas faire de mal, neutralité carbone en 2050 oblige – mais tout va plutôt pas mal puisque les stocks gaziers français remonteront certainement à 100 % au début de l’hiver – mais enfin l’heure est quand même grave – mais l’économie française est solide – mais le chômage partiel sera réactivé et le télétravail encouragé – et puis des petits délestages électriques affectant particuliers et entreprises ne sont pas à écarter totalement si les hypothèses les moins favorables ont le mauvais goût de converger.

On s’y perd, on s’y embrouille. Pas étonnant qu’il ait fallu recourir au dispositif ultra-secret et si finement expert du Conseil de défense sur l’énergie pour démêler tant de fils enchevêtrés. Toutes ces hypothèses, toutes ces incertitudes, toutes ces délicates considérations géopolitiques… Mais gardons le cœur joyeux, chers lecteurs, car « l’État agit » pour faire baisser le prix de l’énergie, pour assurer nos approvisionnements stratégiques et pour nous emmener en chantant sur le chemin de la sobriété heureuse. Du trois en un, pour ainsi dire. Quel génie ! 

Mais pourquoi s’étonner de tant de talent au sommet ? Le gouvernement n’a-t-il pas piloté la pandémie de Covid de main de maître ? Restrictions, confinements, Conseil de défense, chômage partiel, télétravail – tout ce qui a fait son succès dans la gestion de la crise précédente se retrouve intact dans la nouvelle. Manque une sorte de pass énergie en lieu et place du pass sanitaire mais ne faisons pas les difficiles, la menace du rationnement s’en rapproche.

Il est cependant curieux de voir Emmanuel Macron reprendre trait pour trait ses méthodes du premier quinquennat car on était sous l’impression qu’il souhaitait placer le second sous les auspices du renouveau. Peu après sa réélection, ne disait-il pas :

« Le peuple français n’a pas prolongé le mandat qui s’achève. (…) Ce peuple nouveau, différent d’il y a cinq ans, a confié à un président nouveau un mandat nouveau. »


Un renouveau total, donc, car tout le monde, lui, les Français, son parti (qui se rebaptise ces jours-ci Renaissance), a changé en cinq ans. Du moins est-ce sa façon de présenter les choses car sous la posture et la magie des mots, on devine que la rhétorique du renouveau a surtout pour objectif d’éluder le débat sur le bilan du quinquennat passé, les entorses aux libertés individuelles et les 600 milliards de dette publique en plus. Tout oublier, recommencer à zéro, comme si de rien n’était.

Pour preuve de sa bonne foi, à moins que ce ne soit plus concrètement parce que la situation législative de la majorité présidentielle devenait de plus en plus tendue, il promettait alors de mettre en place un Conseil national de la Refondation directement inspiré du Conseil national de la Résistance (petit nom CNR) cher à tous nos collectivistes et autres ardents thuriféraires de notre Etat providence. Finies, les réformes et les circulaires qui viennent d’en haut. De la concertation, du débat, du bon sens au plus près des Français grâce à la présence conjointe des forces politiques, économiques, sociales et associatives du pays, ainsi que des élus des territoires et des citoyens tirés au sort. 

Vous avez dit renouveau ? Vous avez dit nouvelle méthode ? On se rappelle pourtant que chaque moment délicat du mandat précédent a été momentanément surmonté/contourné/étouffé par la création de diverses instances censées nous convaincre que les préoccupations des Français étaient la seule et unique boussole du gouvernement. On avait déjà le Conseil économique, social et environnemental (CESE), « machin » typiquement décoratif, mais ce fut en plus le Grand débat national, ce fut la Convention citoyenne pour le climat, ce fut le Collectif citoyen sur la vaccination, ce fut le Haut-Commissariat au Plan. À chaque nouvel obstacle politique, son amusement « citoyen », sa dose théâtrale de « renaissance ». 

Autrement dit, voici une instance de renouveau et de refondation qui ressemble furieusement à tous les conseils, comités et autres conventions citoyennes qui l’ont précédée. Et qui risque de déboucher sur la même inutilité – qui peut dire à quoi a servi le Collectif sur la vaccination mis sur la touche dès l’instauration du pass sanitaire ? D’autant que les participants pressentis aujourd’hui ne sont pas complètement aveugles sur sa teneur essentiellement politicienne. La méthode est non seulement la même qu’avant, mais elle est de plus complètement éventée. 

Mais M. Macron semble n’être satisfait que lorsqu’il peut pousser ses idées printanières jusqu’au paradoxe le plus sublime, un peu à la façon du « en même temps, ni de droite ni de gauche » qui a fait sa renommée. Qui d’après vous va présider son tout nouveau tout beau Conseil de la Refondation qui n’est clairement ni tout beau ni tout nouveau (mais qui sera installé jeudi 8 septembre prochain) ?

Chers lecteurs, préparez-vous, car le nom que vous allez lire confine à l’absurde : François Bayrou !

Oui, vous avez bien lu, François Bayrou, qui grenouille dans la politique française depuis toujours, François Bayrou qui ne peut supporter l’idée de ne pas se trouver en toutes circonstances au plus proche des allées du pouvoir, François Bayrou qui persiste à penser qu’un grand destin national l’attend. Mettez-vous à sa place : et s’il était l’homme providentiel qui allait réussir à nous faire surmonter la crise actuelle qu’il considère comme « la plus grave que la France ait connue depuis la guerre » ?

Mais reprenons son très long CV. François Bayrou qui fut nommé Haut-Commissaire au plan à la rentrée 2020 dans les valises du gouvernement Castex, François Bayrou, enfin, qui s’y est montré d’une si grande discrétion que plus personne ne sait au juste ce qu’il y faisait et que les rares qui le savent ont toujours trouvé ses « notes d’ouverture » bien minces.

Mais du moins en déduit-on sans grand étonnement ce qu’Emmanuel Macron veut dire quand il se lance dans le lyrisme de la refondation et du renouveau. Au fond, c’est très simple : on reprend les mêmes méthodes éculées de conservation du pouvoir, on reprend les mêmes vieux baroudeurs de la politique et on recommence (toujours les même erreurs) ! Ça promet. 


Illustration de couverture : Emmanuel Macron et François Bayrou sur fond de lignes électriques. Montage à partir de photos AFP.

26 réflexions sur “La REFONDATION, c’est simple : on prend les MÊMES et on recommence

  1. Notre consommation actuelle est de 40 milliards de m3 de gaz par an. Or, selon des études sérieuses nous disposerions d’une capacité estimée entre 4000 et 5000 milliards de m3 dans notre sous-sol, soit dans l’hypothèse basse une centaine d’année de consommation.

  2. « La politique est une affaire sale, une ruse, un cul-de-sac idéologique, un vaste pilleur de ressources intellectuelles et financières, un mensonge corrupteur, une tromperie, un moyen de répandre dans le monde un énorme malheur, d’une espèce inattendue et indétectée ; c’est le plus grand gaspilleur de productivité humaine jamais concocté par ceux qui ne croient pas à un authentique progrès économique et social. » – Jeffrey Tucker

  3. « L’Etat moderne est inefficace et nuisible. Puisqu’il est inefficace on pourrait se passer de lui ; puisqu’il est nuisible on devrait le faire » – Murray N. Rothbard – Man, Economy, and State- Princeton – 1962

  4. « Il y a trop de grands hommes dans le monde ; il y a trop de législateurs, organisateurs, instituteurs de sociétés, conducteurs de peuples, pères des nations, etc. Trop de gens se placent au-dessus de l’humanité pour la régenter, trop de gens font métier de s’occuper d’elle « La Loi » (1850) Bastiat

  5. « Le plus pervers ennemi de l’humanité ne pourrait avoir inventé un plan plus destructeur de son véritable bonheur que celui qui consiste à louer, aux frais de l’État, une corporation d’hommes dont le travail consisterait à amener leurs contemporains, sous de faux prétextes, à l’exercice de la vertu. » – William Godwin (1756 -1836)

  6. Conseil de la Refondation. Ça me rappelle le Ministère du Temps Libre du premier gouvernement Mitterrand.

    Des sinécures et autres comités Théodule, il n’y a vraiment qu’eux.

    Nous n’oublierons pas le Ministère du Redressement Productif. Là aussi, il n’y a qu’eux pour nous pondre ce genre d’appellation d’origine incontrôlée.

    Tout pour justifier un népotisme désormais systémique.

    Il est évoqué plus haut l’alcootest politique de Coluche. JM Bigard proposait des ministres à points, comme le permis.

    Il y a bien longtemps, plaisanterie à part, que tous ces impétrants de nature, nuisibles patentés, devraient être justiciables.

    Vœu pieux. La « ripoublique » des copains a encore de beaux jours à vivre.

    • Comme ces « conseils », tricotage macronien destiné, vraisemblablement, à contourner le processus démocratique, pourquoi continuons-nous à entretenir grassement des députés qui déjà ne brillent ni par leur implication ni par leur efficience ?

    • > Nous n’oublierons pas le Ministère du Redressement Productif.

      Aaaaah, mais non, c’est une avancée historique majeure ! Il s’agit du premier nom de ministère comportant une contrepèterie ! Au moins, on ne paye pas les fonctionnaires pour rien !

      A côté de ça, l’URSSAF, c’est de la blague sinistre de communistes aux ordres de Moscou.

  7. Bonjour Nathalie, bonjour à toutes et tous,
    Ne nous plaignons pas ! En vertu du grand principe, cher à notre Président qui décline le « en même temps » à tous les coins de ses discours, nous aurions pu avoir « en même temps » le Pass sanitaire/vaccinal, le masque, le café assis-debout, les sorties limitées à 1 km/1h, les attestations pour sortir le chien, le confinement avec toutes les restrictions liberticides que nous avons connues et pourrions bien connaître encore, les achats essentiels-non essentiels, …. et par dessus tout ça le Pass énergie avec les tickets de rationnement ! Imaginez un peu la galère !
    On a arrêté le Covid juste à temps pour nous permettre de découvrir le reste.
    Donc, que diable ! Soyons tous assez raisonnables pour reconnaître que le pire nous a été épargné.
    L’ironie est un défouloir 🤣 !
    Bonne fin de journée.

    • Je ne comprends pas la remarque :
      – l’image du bandeau du blog est la même depuis la rentrée 2018 : la statue de la liberté ;
      https://leblogdenathaliemp.com/2018/08/23/rentree-2018-sous-le-signe-de-la-liberte-dans-nos-vies/
      – et l’image du bandeau de l’article est la même depuis la publication hier : brochette Macron, fils électriques, Bayrou.
      Soit vous avez des visions, soit – plus probable – vous lisez sur un téléphone portable, ce qui, je viens de le constater, mange considérablement les extrémités droite et gauche des images de couverture (blog et articles). D’où l’impression que l’image de cet article se résume à des fils électriques. Mais à la fin de chaque article, je remets l’image en vignette avec source et explication.

      • Bonjour et merci pour la réponse documentée 😀
        En effet c’est depuis un téléphone
        Oui pour les vignettes, je n’avais jamais fait attention.
        J’en ai profité pour jeter un coup d’œil à cet article de 2018 et je me suis arrêté plus particulièrement sur ce paragraphe :

        « Or rien ne dit qu’il n’existe qu’une seule forme de bonheur sur terre. Tout l’enjeu posé par l’humanisme libéral consiste à admettre que le bonheur de notre voisin puisse être différent du nôtre. Ce qui me frappe particulièrement depuis que je tiens ce blog et que j’en discute éventuellement autour de moi, c’est la forte tendance de tout un chacun à prendre ce qu’il tient pour « bien » à titre personnel pour un bien absolu qu’il faudrait imposer à tous. »

        J’avais remarqué depuis très longtemps cette tendance

Répondre à goufioAnnuler la réponse.