École PUBLIQUE : même dans les CITÉS, on veut la QUITTER

Info du 4 mars 2021 : Le Point a publié hier une interview d’un ancien principal de collège (élevé pour sa part dans une cité de Seine-Saint-Denis) auteur d’un livre intitulé « Requiem pour l’Éducation nationale ». Il y décrit lui aussi toutes les « lâchetés » de l’Éducation nationale face à la pression islamiste, la dégringolade éducative au nom d’une pédagogie dite de la « bienveillance », les notes gonflées pour faire du résultat et la fuite vers le privé. À lire.

Je vous recommande la lecture d’une enquête des plus intéressantes publiée la semaine dernière par Mediapart sous le titre « Des élèves se réfugient chez les cathos pour échapper au ghetto ». Quel ghetto ? Celui des cités, celui des quartiers dits sensibles qui font plus souvent la une de la presse régionale pour trafics en tout genre, violence de moins en moins sporadique et délinquance au quotidien que pour les prix de grammaire de leurs élèves.

Article surprenant, venant de l’écurie Plenel. Mais qui s’explique en fait très bien si l’on garde à l’esprit que Mediapart, vent debout contre le projet de loi contre le « séparatisme islamiste » du gouvernement, accuse ce dernier de prendre le problème par le petit bout islamophobe et sécuritaire de la lorgnette alors que le vrai problème serait à chercher du côté de la « ségrégation sociale ».

Procès plus militant que réaliste car de multiples rapports ont montré que l’école dite républicaine est le siège de dérives communautaires incessantes en provenance de l’islam : tel élève refuse le rouge dans les classes car cette couleur n’est pas autorisée par le Coran, tel autre ne veut pas aller à la piscine car s’il boit la tasse, cela va casser son jeûne du ramadan, etc. etc.

Elle est aussi le lieu d’une violence de moins en moins discrète entre élèves ou vis-à-vis des enseignants dont ces derniers ont fini par parler en masse avec le hashtag #pasdevague suite au braquage d’une de leurs collègues par un élève qui pointait sur elle une arme factice mais très convaincante. Nul besoin de tomber dans l’excès sécuritaire quand il s’agirait d’abord pour le gouvernement de remplir ses missions régaliennes avec sérieux – ce qui n’est malheureusement pas du tout le cas.

Sans compter la dramatique baisse du niveau académique qui affecte tous les élèves depuis plus de 30 ans, indépendamment de leur catégorie sociale d’origine.

Mais finalement, en ce qui concerne l’article susmentionné, peu importe, car il est en lui-même d’une grande richesse de témoignages qui montrent à quel point notre pachydermique secteur public de l’Éducation fait de plus en plus figure de repoussoir pour qui veut accéder à un service éducatif digne de ce nom.

On sait depuis longtemps que nombre de familles aisées – parmi lesquelles beaucoup voteront toujours à gauche et vous diront toujours à quel point la France s’honore d’avoir un enseignement public de l’envergure de notre mammouth – optent pour le privé ou font du moins tout pour échapper à la fatalité de la carte scolaire via le jeu des matières optionnelles et des adresses de complaisance.

Mais de nombreux parents des quartiers défavorisés font eux aussi de plus en plus souvent le choix de l’école privée catholique située à proximité de chez eux pour éviter à leurs enfants l’enfermement communautaire et la dérive de violence qu’ils ont eux-mêmes connus il y a 20 ou 30 ans – et, comme le précisent certains, à l’époque ce n’était rien par rapport à aujourd’hui.

Pour Khaled Baki, père de famille du quartier de La Paillade à Montpellier, il est un signe qui ne trompe pas :

« Quand j’étais à l’école primaire, le directeur habitait le quartier et sa fille Valérie était dans ma classe. Aujourd’hui, c’est fini tout ça. Les enseignants n’habitent plus le quartier et n’y inscrivent plus leurs enfants… C’est ce qui me choque le plus. »

.
Donc pour ses filles, la décision fut simple : le collège Saint-Roch situé à quelques minutes du domicile familial pour fuir ce ghetto où il ne fait pas bon mettre en avant son goût pour l’école et ses bonnes notes.

Laura, l’une des mamans interrogées, raconte avoir connu « tous les quartiers chauds de Toulouse » dans son enfance. Elle a même été en classe avec Abdelkader Merah, qui a été condamné à 30 ans de réclusion pour complicité des sept assassinats de son frère le terroriste islamiste Mohammed Merah :

« Il tenait déjà des propos limites… Je pense que c’est une histoire d’éducation et d’enfermement, et je veux autre chose pour mes enfants. »

.
Tant il est vrai que le séparatisme islamiste et la pression communautaire incessante ne sont pas une vue de l’esprit. Dans le quartier de Laura, les enfants qui fréquentent l’école privée Sainte-Germaine comme son fils sont attirés par les autres avec des formules du type « Vous êtes de la famille, venez avec nous ». Les mères redoutent par-dessus tout que ces avances qui jouent sur la corde affective n’entraînent leurs enfants dans les trafics de drogue ou la délinquance.

De son côté, loin de se cantonner au recrutement d’enfants de familles aisées dotés d’un bulletin scolaire impeccable, l’enseignement catholique considère qu’il est dans son rôle en accueillant des élèves d’origines diverses dont les familles sont en recherche d’encadrement, de sérieux et, pourquoi pas, d’une vraie possibilité d’intégration avec à la clef toutes les promesses de l’égalité des chances ainsi que celles d’un ascenseur social qui se remettrait à fonctionner.

Ainsi que l’explique Philippe Delorme, le secrétaire général de l’enseignement catholique :

« Nos instances ont défini des politiques nationales destinées à privilégier la mixité sociale et le développement des formations professionnelles, pour que l’accueil de tous soit une réalité. »

.
Mais il n’est pas rare que ces écoles ne deviennent elles aussi les cibles des incivilités et des violences qui gangrènent les quartiers dans ou à proximité desquels elles sont situées. Les parents et enseignants interrogés par Mediapart le disent et les élèves ainsi que le personnel de l’école primaire Monseigneur Cuminal située en bas d’une tour du quartier d’Étouvie à Amiens viennent d’en faire la triste expérience :

L’école « subit quotidiennement les jets d’objets et de déchets en tout genre lancés depuis les étages au pied des classes. Des agressions du voisinage, différents trafics à proximité, des intrusions et occupations sauvages de la cour, des rodéos près de l’école participent à l’insécurité et empêchent l’école de fonctionner normalement. »

.
Résultat, cette annexe de quatre classes ouvertes spécialement pour apporter une solution éducative à des familles abandonnées par les pouvoirs publics se trouve en quelque sorte abandonnée elle-aussi par défaut de présence et d’action régalienne dans son quartier et sera fermée à la fin de l’année scolaire. Les élèves seront éventuellement redéployés dans d’autres locaux.

Il eut cependant été étonnant que Mediapart ne donnât pas la parole à l’habituel sociologue de service pour qu’il vienne rappeler quand même les vertus égalitaristes indiscutables du monopole étatique de l’éducation :

« Il faut déconstruire l’idée de familles libres de leurs choix. Quand on entre dans les détails, le système éducatif est d’autant plus inégalitaire là où il est le moins régulé par la force publique. »

.
Dans son idée, les gens des ghettos n’ont pas vraiment le choix. Ils pensent peut-être permettre à leurs enfants de s’en sortir en quittant l’école publique, mais ils sont voués à déchanter rapidement au regard des critères élitistes et financiers du privé qui, de plus, ne les considérera jamais comme faisant partie du même monde que les autres élèves. La vision marxiste, la lutte de classes.

De toute façon, il est établi depuis longtemps par les dévoués syndicalistes qui foisonnent dans l’Éducation nationale que l’idée de choix est totalement pernicieuse et contraire au principe de l’égalité. Petit exemple : l’enseignement privé organise des portes ouvertes. À les croire, c’est carrément l’horreur consumériste !

« Dans notre fonctionnement, on est obligé de s’aligner sur le privé qui fait des portes ouvertes, donc voilà, on fait des portes ouvertes sinon les parents ne peuvent pas ‘choisir’ l’école. Et donc voilà, on est dans une consommation de l’école. » (vidéo, à partir de 18′ 20″)

.
C’est vrai, quoi ! Laisser le choix aux parents dans l’éducation de leurs enfants, quelle horreur ! Mais qu’on nous rende notre monopole, s’exclament en substance nos syndicalistes, cette concurrence du privé est déloyale !

On ne sera donc pas surpris de lire en commentaire de l’article de Mediapart l’éternelle diatribe gauchiste contre les financements publics reçus par le privé (comme si les parents du privé ne payaient pas aussi des impôts) ainsi que cette belle envolée d’idéologie complètement butée (photo ci-dessous) :

« L’école publique, l’école de la République, la seule école libre, doit être fière d’accueillir tous les élèves sans distinction ».

Les témoignages des familles, les récits de leur quotidien, leurs espoirs de réussite ? Rien de tout cela ne fait le poids face au dogme.

La dégringolade éducative de l’Éducation nationale, la violence, le communautarisme ? Un faux problème. L’important c’est l’égalité et l’égalité, cela veut dire : tout le monde sans exception dans la même galère.

Il n’en est que plus drôle de lire à la fin de l’article de Mediapart que l’une des élèves concernées, très à l’aise en classe de CM2 à l’école de la Sainte-Famille à Montpellier, a déjà décidé que plus tard, elle serait… notaire ! Hou la la ! À ne surtout pas dire au sociologue de service !


Illustration de couverture : École publique.

16 réflexions sur “École PUBLIQUE : même dans les CITÉS, on veut la QUITTER

  1. A ce sujet, on peut se cogner le dernier livre de Thomas Sowell, « Charter Schools and Their Enemies ». Je ne l’ai pas lu, mais c’est sûrement très bien. Les « charter schools », aux Etats-Unis, sont l’équivalent de nos écoles privées. Elles donnent les mêmes bons résultats, pour les mêmes raisons, et sont haïes par la gauche et les syndicats d’enseignants du public, pour les mêmes raisons.

    Quant à Thomas Sowell, pour ceux qui ne le connaîtraient pas, c’est un économiste américain, libéral, noir. Autrement dit, un éléphant blanc.

    Il a 90 ans, et il écrit encore. Une biographie et un documentaire viennent de lui être consacrés :

    https://reason.com/video/2021/03/01/thomas-sowells-maverick-insights-on-race-economics-and-society

    • Sowell est à mon programme des personnalités libérales que j’aimerais présenter ici. D’autant que comme Vargas Llosa, lui aussi a fait un « voyage intellectuel » du marxisme au libéralisme (chez lui, le déclencheur a été une étude sur le salaire minimum des ouvriers des plantations de sucre de Puerto Rico, d’après ce que j’ai lu). Reste à trouver le temps…

  2. Personne ne sera étonné que je dise ne pas être prête à me « cogner » un livre, sans doute ardu, traitant de l’éducation, et à ma grande honte je dois même avouer mon soulagement de n’avoir pas pu accéder à l’article de Médiapart.
    Cependant cela ne m’empêche pas de témoigner de mon expérience personnelle. J’ai eu quatre enfants dont la première n’a fréquenté que l’école publique (après avoir appris à lire chez les bonnes soeurs), les trois autres ont été scolarisés essentiellement dans le privé. Je dois avouer que du point de vue purement scolaire c’est l’aînée qui a obtenu les résultats universitaires les plus brillants (doctorat de mathématiques appliquées).
    J’ajoute que dans les années 1980 j’ai été amenée à faire du soutien scolaire dans un collège privé, en classe de sixième. Il y avait déjà des enfants de familles musulmanes, je me souviens d’un petit turc très malin et de plusieurs jeunes filles. Je ne pense pas que les parents essayaient de les faire échapper à un quelconque ghetto. Je crois que c’était un choix délibéré, d’autant plus facile à faire que les tarifs trimestriels étaient calculés selon un quotient familial prenant en compte les revenus fiscaux de la famille ainsi que le nombre des enfants.

    • Moi aussi, j’ai fait toute ma scolarité dans le public à partir de la 6ème avec bac en 1979. A l’époque, il y a donc plus de 40 ans, l’école comme les quartiers populaires n’étaient pas du tout soumis aux mêmes problématiques qu’aujourd’hui. Ça allait juste commencer : Imam Khomeini en Iran à partir de 1980 (i.e. revival politique de l’Islam) et pédagogisme, nivellement par le bas, etc. avec Mitterrand à partir de 1981. (Il est vrai que le collège unique avait commencé le travail en 1975).

      • Tout dépend où vous avez fait votre scolarité. A Vaux en Velin ou au centre ville de Lyon ce n’est pas la même chose. Et effectivement ça a commencé à se gâter à partir des années 80 et ça a empiré au tournant des années 90. Mais les problèmes étaient déjà présents, notamment dans ce qu’on appelait alors les cités. Tous ce qu’on entend aujourd’hui existait déjà. Je pourrais vous raconter des anecdotes de la région grenobloise, on croirait qu’elles se sont passées aujourd’hui.

        Pour ma part j’ai eu la chance de faire ma scolarité à Briançon notamment au lycée d’altitude. C’était super.

      • « j’ai eu la chance de faire ma scolarité à Briançon notamment au lycée d’altitude. C’était super. »

        Ah ah, je connais bien ! Il paraît que c’est toujours super (d’après des amis arrivés récemment à Briançon depuis la région parisienne et dont la dernière fille est en 1ère dans ce lycée).

      • @Nathalie : ah oui je l’ai aimé ce lycée ! Concernant le collège j’étais aux Garcins à Briançon. Très bien aussi. C’est passé trop vite. Mais ce que j’ai préféré c’est la classe prépa et l’université. J’aurais pu y rester toute ma vie. Que des bons souvenirs !!

      • @ Lionel
        A propos de Grenoble, Lyon, Vaux-en-Velin, il y a une tradition ancienne bien ancrée de mafia et de grand banditisme dans le prolongement de l’Italie et Marseille – avant même que ne viennent s’y greffer les trafics liés à l’islamisme.

      • @Nathalie : oui effectivement il y a des phénomènes mafieux à Grenoble mais ça ne m’a jamais fait peur, ce sont des problèmes cantonnés à un certain milieu. Par contre, à Grenoble il y avait déjà dans les années 80 des problèmes de sécurité et de délinquance tels que nous les vivons aujourd’hui. J’ai lu dans un classement que c’est la 6ème ville la plus insécuritaire de France, ce n’est pas une réputation imméritée.

        Il faut souvenir qu’en 2015 il y a eu trois jours d’émeutes à Grenoble avec une couverture par les médias nationaux. Tout ça a été causé par un braqueur de casino qui s’était fait descendre après un échange de tirs à la kalashnikov. Les médias ont décrit le quartier dans lequel ça s’est passé comme un ghetto, ce qu’il n’est pas du tout, et les sociologues de service ont à nouveau pointé la faute de l’état, ce qui n’était pas vrai non plus.

        J’ai quitté cette ville en 2000 et j’en suis très content. Comme disait Fernand Reynaud, « ne me parle pas de Grenoble ».

      • Suite à mon dernier message, je vous mets la page qui donne le classement des villes les plus criminelles, je pense d’ailleurs que c’est un abonné qui l’avait posté:
        https://www.numbeo.com/crime/region_rankings_current.jsp?region=155

        On voit que Grenoble est 6ème juste après Paris (aïe).
        Et tout en bas dans les profondeurs du classement : Münich et Zürich. Pour Münich je confirme on ressent un incroyable sentiment de NON insécurité quand on est là bas. C’en est même troublant quand on vient d’une ville comme Grenoble.

      • Pour être allé à Vienne et Bratislava (hors classement) l’été dernier, je ne peux que confirmer.

        Pas un instant je n’avais ressenti un soupçon de crainte en sortant seul le soir ni en prenant le métro aux heures tardives.

        Il suffisait d’ailleurs de voir la façon dont s’habillaient les jeunes femmes dans ces deux villes pour être rassurés sur les éventuels risques encourus.

        Inimaginable en France.

  3. Les approches dogmatiques conduisent inexorablement au déni de réalité, lequel permet de comprendre les politiques éducatives des dernières décennies dont les désastreuses et pathétiques réformes mises en place sous François Hollande.

    Point commun de toutes ces réformes : on saupoudre des micro-changements cosmétiques pour dire qu’on a fait quelque chose, on désorganise l’enseignement pour montrer à ces parents et à ces enseignants qui est le boss, et à la fin rien ne change, mais les grands principes sont sauvés. Et le tout avec un langage grandiloquent pour faire croire à une révolution copernicienne.

    Contrairement à certains sociologues grands pourfendeurs de la reproduction sociale, mes enfants sont dans le public. Il faut dire que chez moi la situation n’est pas aussi compliquée qu’à Toulouse. Et que le public donne accès ici à des filières qu’on ne trouve pas dans le privé. Un autre avantage pour mes enfants c’est qu’ils se confrontent à la réalité sociale contemporaine et c’est important pour être en mesure de s’en sortir dans la jungle. Etant moi-même passé par l’enseignement privé en primaire, je ne voulais pas les confronter au choc civilisationnel que j’ai vécu en passant dans le public au collège.

    Et pour conclure sur votre article, il me semble également essentiel de promouvoir la liberté des familles autant que faire se peut, une liberté qui ne cesse de s’éroder. Par exemple, dans de nombreux endroits, les familles n’ont plus le choix de la langue vivante 1 en 6ème car c’est systématiquement celle enseignée en CM2. Et comme de nombreux enseignants de primaire ne connaissent que l’anglais et l’espagnol, exit donc l’italien ou l’allemand.

  4. Je ne sais pas si le critère public-privé est l’essentiel, tout dépend du territoire, des origines ethnos des élèves, de la qualité des profs et de la direction etc…
    Un article de 2018 faisait déjà très bien l’état des lieux :
    https://jean-jaures.org/nos-productions/l-ecole-catalyseur-de-la-fragmentation-de-la-societe-francaise

    « Les gens pensent désormais en catégories ethno-raciales. Il y a la peur des violences, du harcèlement et bien souvent du “grand Noir”…

Répondre à Robert MarchenoirAnnuler la réponse.