Couvre-feu : Darmanin ou le petit BEAUVAU du cinéma permanent

Vous avez aimé le Ségur de la santé, ce grand « machin » pompeux qui devait donner un peu d’agilité à notre mammouth hospitalier complètement débordé par le Coronavirus mais dont on constate chaque jour qui passe qu’il a surtout consisté à déverser des milliards d’euros sur notre système de santé sans en amorcer la moindre réorganisation en profondeur ? Alors forcément, vous allez a-do-rer le Beauvau de la sécurité inauguré avant-hier par le Premier ministre !

Car figurez-vous que parmi les trois objectifs que se donne Jean Castex pour adapter nos forces de l’ordre au régalien du XXIème siècle, le travail de terrain au plus près de la population sans entrave bureaucratique inutile arrive en première position :

« La finalité poursuivie est claire (…) : avoir le plus de policiers et de gendarmes possible au plus près du terrain et des populations, les moins englués que possible dans des procédures lourdes ou inadaptées. »

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En bon ministre de l’Intérieur dynamique et soucieux de faire du zèle, Gérald Darmanin n’a pas attendu que tout ceci soit écrit noir sur blanc dans un long rapport que personne ne lira. Dès dimanche 31 janvier dernier à 18 heures, il se transportait « sur le terrain » d’un péage très fréquenté lors des retours de week-end et il observait avec une satisfaction inouïe qu’entre le conducteur automobile et le PV, il n’y avait désormais plus aucune entrave d’aucune sorte :

Et d’égrener des chiffres dégoulinants de zéros censés caractériser son engagement total en faveur de la sécurité des français, à commencer par leur sécurité sanitaire : 600 000 contrôles et 60 000 verbalisations depuis le début de l’instauration du couvre-feu à 18 heures, annonce martiale d’une augmentation des contrôles de 30 % dorénavant – par Jupiter, Valls et Sarkozy, Darmanin se la joue tolérance zéro pour le virus au-delà de 18 heures ! (vidéo, 01′ 04″) :

Il faut dire que vendredi dernier, après quinze jours de suspense sur un possible reconfinement éventuellement « préventif » et « très serré » qui divisait profondément classe politique et classe médicale, Jean Castex a annoncé… pas grand-chose de nouveau(*) en fait, si ce n’est un durcissement des contrôles quant au respect des mesures en vigueur actuellement, dont le fameux couvre-feu avancé à 18 heures :

« Les policiers et les gendarmes seront mobilisés pour contrôler le non-respect du couvre-feu, l’organisation des fêtes clandestines et l’ouverture illégale des restaurants dans des proportion renforcées. Les dérives de quelques-uns ne sauraient ruiner les efforts de tous. Une consigne de particulière fermeté sera donc appliquée pour ceux qui fraudent les règles en vigueur. »

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C’est ainsi que M. Darmanin s’est retrouvé dimanche soir à montrer ses petits muscles au péage de Buchelay. Inutile de dire que les automobilistes, déjà pris dans des embouteillages encore plus monstrueux que d’habitude en raison du couvre-feu avancé, ont moyennement apprécié.

Il n’est jamais agréable de recevoir une amende de 135 euros. Mais c’est encore plus rageant quand on sait que la situation qui nous vaut cette brimade n’est nullement facteur de circulation du virus. Du temps des confinements, un promeneur isolé pouvait parfaitement se faire verbaliser. Aujourd’hui, le couperet de 18 heures est le prétexte absurde à un cinéma d’autoritarisme qui semble bien éloigné de la seule lutte contre le Covid-19. 

En quoi un conducteur et des passagers en train de rentrer chez eux dans un véhicule fermé sont-ils susceptibles de propager la maladie ? En quoi le sont-ils plus avant 18 heures qu’après ? On aimerait le savoir.

Et ce d’autant plus que les études commencent à s’accumuler qui montrent d’une part que le couvre-feu avancé à 18 heures aurait eu un effet au mieux nul au pire aggravant sur la pandémie en poussant les gens à s’agglutiner dans les magasins entre 17 et 18 heures pour faire leurs courses ; et d’autre part que rien ne prouve que les restrictions ultra-strictes telles qu’imposées en France (sous les quolibets mi-étonnés mi-blasés de nos voisins) seraient plus efficaces que le respect scrupuleux et responsable  des gestes barrières (éventuellement associé à l’interdiction ponctuelle des très grands rassemblements).

Autrement dit, le gouvernement se retrouve pris au piège de son autoritarisme désordonné.

La dégringolade de l’économie française, dont on n’a encore rien vu puisque le « quoi qu’il en coûte » sert précisément à adoucir le choc, a quand même abouti à un recul du PIB de 9 % en 2020, du jamais vu depuis la création de l’INSEE en 1946. Encore plus parlant, ceci correspond à une chute du PIB par habitant de 3 250 euros. Dans ces conditions qui signifient concrètement pauvreté, déclassement et mal-être social et psychologique, on comprend que le gouvernement cherche une façon de montrer que l’État « fait quelque chose » contre le Coronavirus sans en passer par un reconfinement stricto sensu.

D’où une nouvelle salve de coups de menton et de contrôles absurdes à l’égard d’un couvre-feu à 18 heures qu’il n’est plus possible de supprimer sans donner l’impression que la lutte contre le coronavirus se relâche et sans perdre la face malgré sa douteuse efficacité.

Et d’où un Gérald Darmanin tout feu tout flamme pour distribuer abondance de PV et de leçons de conduite sans objet dans une langue de bois digne du petit Beauvau du cinéma permanent que les ministres de l’Intérieur ont l’habitude de jouer devant les caméras faute de pouvoir produire des résultats effectifs quant à la sécurité des Français. Ça promet.


(*) Nouvelles mesures : fermeture des centres commerciaux non alimentaires de plus de 20 000 m2 et durcissement des conditions d’entrée et sortie du territoire français.


Illustration de couverture : Le ministre de l’Intérieur Gérald Darmanin assiste aux contrôles du couvre-feu à 18 heures, Mantes-la-Jolie, dimanche 31 janvier 2021. Photo Twitter.

15 réflexions sur “Couvre-feu : Darmanin ou le petit BEAUVAU du cinéma permanent

  1. Nathalie, je trouve que vous avez parfaitement bien résumé la situation avec votre expression d’ « autoritarisme désordonné ». Ce couvre feu à 18h est tout aussi absurde que le confinement si ce n’est qu’il coûte moins cher. L’Espagne a réouvert, l’Italie a réouvert. Est-ce que nous attendrons le plan d’aide du FMI pour réouvrir ?

    Notons qu’une fois de plus c’est sur la cible facile, les automobilistes, que le pouvoir tape avec rigueur. Ce n’est pas nouveau. C’est moins risqué d’installer un radar qui débite du PV à la vitesse du gouvernement sortant ses décrets liberticides que d’aller traquer les dealers et les bandes organisées dans les quartiers difficiles. En plus en termes de communication, les officiels se faisant caillasser aux portes de la cité n’auraient pas fait d’aussi belles images.

  2. Des restrictions ultra-strictes imposées en France ? C’est une plaisanterie… Pour trouver des restrictions ultra-strictes, il faut aller dans le pays qui affiche les meilleures performances du monde contre le Covid : Taïwan. Une île qui est juste en face de la Chine, et qui entretient des relations étroites avec ce pays. D’innombrables voyageurs vont de l’un à l’autre, en temps normal.

    Depuis le début de l’épidémie, Taïwan compte… 8 morts, en tout et pour tout. Au sein d’une population de 23,5 millions d’habitants. Si nous avions lutté contre l’épidémie avec le même succès que Taïwan, nous aurions 23 morts. Nous en sommes, en réalité, à 76 000.

    La recette de Taïwan, c’est la sévérité de ses restrictions.

    Blocage des frontières véritable (ou filtrage strict selon les périodes et la nécessité).

    Quarantaine impitoyable des personnes contaminées, ou simplement susceptibles de l’être ; c’est à dire pas l’isolement pour rire à la franchouille (« soyez gentils, restez chez vous »), mais l’enfermement dans des établissements conçus à cet effet et gérés par le gouvernement. Sous la garde de la police.

    Et enfin, flicage électronique intrusif ne s’arrêtant à aucun scrupule pour la vie privée, via la localisation des téléphones portables, le suivi des achats par carte de crédit et les caméras de surveillance. Avec connexion entre les données de santé, les données d’immigration, les informations sur les déplacements individuels, les personnes rencontrées, les rassemblements fréquentés…

    Le présidôn de la CNIL, s’il y avait ça chez nous, il se ferait hara-kiri.

    Tout cela, bien sûr, assorti de sanctions véritables et dissuasives. Un type en quarantaine, qui a eu la mauvaise idée de sortir de sa chambre pour s’aventurer 8 secondes dans le couloir, s’est pris 2 900 euros d’amende.

    Une hôtesse de l’air, qui a grillé sa quarantaine pour aller au restaurant, a été licenciée par sa compagnie. (En France, non seulement aucun chef d’entreprise n’aurait l’idée de licencier un salarié pour une simple atteinte à l’intérêt général, non seulement les syndicats mettraient le feu au pays si un patron s’avisait de le faire, mais un tel licenciement serait, très probablement, illégal.)

    Mais les sanctions encourues sont encore plus sévères. Enfreindre les règles de la quarantaine peut valoir jusqu’à 59 000 euros d’amende… et 2 ans de prison.

    Et le plus rigolo, tenez-vous bien : répandre, sur l’épidémie, de fausses informations susceptibles de nuire à autrui, peut valoir jusqu’à 88 000 euros d’amende et 3 ans de prison.

    Les Didier Raoult, Christian Perronne, Alexandra Henrion-Caude, Martine Wonner et j’en passe, ils seraient en prison, à Taïwan. Et je ne parle pas de tous les blogueurs qui répercutent leurs mensonges…

    En contrepartie, il n’y a pas de confinement généralisé, à Taïwan. Mais les gros malins négationnistes du Covid oublient toujours de mentionner la contrepartie de cette absence de confinement. Ils veulent nous faire croire qu’on aurait pu s’en tirer avec pas ou peu de restrictions, plus la petite pilule magique du bon docteur Raoult qui ne coûte rien et qui fait des miracles.

    Et puis cet autre petit détail : les Taïwanais ne font pas la révolution face à ces mesures, ils ne jettent pas des cocktails Molotov, ils ne hurlent pas à la dictature sanitaire, ils n’attribuent pas à leur président des fantasmes homosexuels avec des Noirs… ils obéissent. Une notion qui n’existe pas, en France.

    Résultat : 8 morts, en tout et pour tout, depuis plus d’un an que dure la pandémie.

    Ah oui, et pour les gros malins : pas l’ombre de la queue d’un gramme d’hydroxychloroquine à l’horizon (ou de zinc, ou de poudre de perlimpinpin…). Contrairement à ce que laissent entendre Raoult et ses groupies. Taïwan ne fait pas dans les remèdes de bonne femme.

    Ces mesures, prises très rapidement, ont été appliquées de façon similaire par les nations asiatiques qui ont bien mieux résisté au Covid que l’Occident : Corée du Sud, Singapour, Hong Kong, Vietnam et Thaïlande.

    L’Australie et la Nouvelle-Zélande ont appliqué des principes du même type.

    Juste pour rigoler, vous pouvez aller voir, sur le site du ministère de l’Intérieur, en quoi consiste « l’isolement » des voyageurs autorisés à rentrer sur le territoire français, suite aux nouvelles mesures hyyyper-rigoureuses et quasiment fascistes de « bouclage des frontières » annoncées par Jean Castex.

    Parmi les effroyables contraintes imposées, il y a… une déclaration sur l’honneur.

    D’un côté un pays qui se contente d’une déclaration sur l’honneur, de l’autre un pays qui menace de 3 ans de prison. Devinez lequel a les meilleurs résultats ?

    Sources :

    https://capx.co/we-must-dispense-with-covid-orientalism-and-learn-from-asias-success

    https://blogs.bmj.com/bmj/2020/07/21/what-we-can-learn-from-taiwans-response-to-the-covid-19-epidemic

    https://edition.cnn.com/2020/12/07/asia/taiwan-quarantine-fine-scli-intl/index.html

    https://www.taiwannews.com.tw/en/news/4068327

    https://www.taiwannews.com.tw/en/news/3878929

    https://coronavirus.jhu.edu/map.html

    https://www.interieur.gouv.fr/Actualites/L-actu-du-Ministere/Attestation-de-deplacement-et-de-voyage

    • Mr Marchenoir aime qu’on obéisse. Il a la passion de l’autoritarisme chevillée au clavier, il aime les bottes en cuir, le fouet et les préfets de camp sanitaires qui font la ronde pour observer, d’un air satisfait, les citoyens modèles parqués dans leurs baraquements, occupés à s’injecter leurs 4h de journal télévisé par jour, où les guides suprêmes détenteurs de la science, de la vérité et de la justice les délivrent de leur ignorance pendant qu’ils mangent leur bol de riz sous atmosphère aseptisée. Les charlatans n’existent pas dans ce paradis, ils sont tout simplement jetés en prison où on les laisse pourrir dans l’oubli, et un charlatan, rappelez-vous, est toute personne qui ose remettre en doute la parole de vérité. Garde à vous! Armez le mâaaaasque! En avaaaaant’ ârche! Et un-deuye, un-deuye, un-deuye, plus vite, bande de molasssons! les derniers seront mis au rebut comme des charlatans! Voilà le rêve de Mr Marchaupas. Quel homme!

  3. M. Robert Marchenoir, votre condescendance pour les « gros malins » est insultante pour ceux qui sont d’un autre avis que le vôtre. Vous vous comportez vis-à-vis d’autrui comme si vous aviez la science infuse, ce qui reste à démontrer, contrairement à certains que vous vilipendez qui, eux, ont fait leurs preuves!

    Ce genre d’attitude porte un nom: cuistrerie.

    • M. Hermodore,

      Je présume par conséquent que vous vous classez d’emblée parmi les « gros malins ». Vous vous sentez donc visé ?

      Traiter les gros malins de gros malins n’est pas de la condescendance : c’est de l’ironie, de la jubilation, de l’esprit, c’est leur infliger le juste retour de leurs mensonges, de leur mauvaise foi, de leurs menées irresponsables et criminelles en temps de pandémie.

      C’est, de surcroît, un qualificatif bien indulgent. Quand nous sommes face à une pandémie qui a déjà fait plus de 2 millions de morts, un autre terme pourraît être plus approprié : meurtrier.

      Je crois que vous ne comprenez pas le français. La science infuse, c’est précisément ce dont mes adversaires se rendent coupables. Ce sont eux qui affirment et insinuent sans preuves et sans savoir. Ce sont eux qui se dispensent d’appuyer leurs allégations sur des faits, des sources dignes de fois et des arguments.

      C’est, quel hasard ! exactement ce que vous venez de faire ici.

      Vous tentez de me traîner dans la boue avec des adjectifs — mais on chercherait en vain, dans votre misérable petit commentaire, la moindre tentative de réfutation des faits précis, circonstanciés, sourcés et irréfutables que je viens de présenter.

      En prétendant fustiger la cuistrerie, vous faites en réalité l’éloge de l’ignorance, du mensonge, de la propagande et de la démolition de la vérité. Vous illustrez exactement ce contre quoi je me bats.

      Quant à vous prétendre insulté, vous employez là la tactique des néo-marxistes qui tentent de faire régner le politiquement correct, le « woke » et la « cancel culture ». Si vous croyez m’impressionner avec ça…

      Avoir un avis n’autorise personne à se prétendre « insulté » quand il est simplement réfuté. Au demeurant, vous savez ce qu’on dit des avis : tout le monde en a un, c’est comme les trous du cul.

      Vous, vous n’avez même pas d’avis. On en chercherait en vain la queue d’un dans ce que vous venez d’écrire.

      Quant à moi, il semble vous échapper que je n’ai pas un « avis » : je viens de porter à la connaissance de tous des faits étayés sur des preuves. C’est tout à fait différent.

      • « Taïwan. Une île qui est juste en face de la Chine, et qui entretient des relations étroites avec ce pays. D’innombrables voyageurs vont de l’un à l’autre, en temps normal. »
        Oui enfin depuis 2008 et en fonction des gouvernements de Taiwan car sinon liaisons rompues depuis 1949. Car les relations restent hyper tendues entre les deux pays et les voyages limités ou difficiles de toute façon :
        http://ceriscope.sciences-po.fr/content/part3/la-frontiere-sino-taiwanaise?page=3

        Donc l’exemple est très mal choisi. Ce qui n’enlève rien aux résultats de Taïwan concernant le traitement de l’épidémie mais laissez la Chine en dehors de l’affaire SVP.

        Ok pour supprimer la CNIL, une invention franchouille qui fait rigoler tous les concurrents étrangers en matière d’informatique au sens large ; un exemple parmi des milliers d’autres pour se tirer une balle de plus dans le pied.

        Un confinement drastique et sélectif pour toute personne positive n’a pas été organisable par nos 6 millions de fonctionnaires. Les populations françaises ne sont pas en cause, seuls leurs gouvernants…qu’ils ont choisi il est vrai, le sont.

        La pilule magique n’existe pas, pas plus que le vaccin magique, ce serait trop facile. Mais épargnez-nous à chaque fois la tirade sur les Didier Raoult, Christian Perronne, Alexandra Henrion-Caude, Martine Wonner, etc…comme si on était leurs partisans. On s’en fout !
        D’abord on ne verra qui aura finalement raison qu’à la fin de la période.

        Et je signale que la déclaration sur l’honneur (de même que mon test PCR négatif) remplie à chaque entrée en France pour un voyage extra continental, est partie au panier (chez moi) car non relevée par les autorités frontalières françaises jusqu’à ce jour.

  4. Bien vu à propos de Darmanin, ça peut se résumer à « nous ne pouvons rien faire contre le désastre en cours, alors faisons comme si nous avions le contrôle de la situation ». C’est pour la même raison que Darmanin veut dissoudre Génération identitaire, dont les actions d’agit-prop lui baisse le slip un peu trop bas sous les genoux en révélant son inaction contre l’immigration clandestine.

  5. Suite à la sévérité annoncée sur le couvre-feu, j’ai vu cette semaine passée certains magasins fermer l’entrée client à 17h45, et même 1 à 17h30, certainement pour s’exonérer de responsabilités vis-à-vis de clients qui seraient retardés par un passage en caisse.

    Ça concentre encore plus les clients, à 17h15 il y avait une queue de 10 clients par caisse, alors que généralement c’est 2 ou 3…

    Doit y avoir un concours de conneries de lancé…

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