HIDALGO : ce qu’elle promet… ce qu’elle fait… et 2022

Info du 13 septembre 2021 : Anne Hidalgo a officialisé hier sa candidature à l’élection présidentielle de 2022 et devrait sans problème obtenir l’investiture du PS. Retour sur les qualités, disons, particulières, de la maire de Paris (Replay) :

Ce n’est un mystère pour personne, Mme Hidalgo pense très fort à la course élyséenne de 2022. Oh bien sûr, elle n’évoque ce sujet qu’avec la plus grande modestie et tout le désintéressement possible, comme le veut depuis toujours le petit savoir-vivre de l’hypocrisie politicienne. Pour l’instant, il n’est donc question pour elle que de prendre « toute sa part » à la future élection présidentielle en contribuant au débat d’idées qui ne manquera pas d’animer la future campagne électorale.

Mais les sondeurs ne s’y sont pas trompés, qui testent régulièrement sa candidature sous les couleurs du Parti socialiste dans les enquêtes d’opinion qui commencent à émerger en vue du fameux scrutin. Et là, contre toutes les attentes de la dame, douche froide : en octobre dernier, un sondage Ifop-Fiducial lui accordait 9 % des voix et aujourd’hui, l’institut Harris Interactive ne lui en attribue plus que 6 à 7 % selon les cas. C’est mieux que le premier secrétaire du PS Olivier Faure, c’est mieux que le redresseur productif Arnaud Montebourg, mais quand même !

Ne vient-elle pas d’être réélue « triomphalement » à Paris, loin devant tous ses concurrents ? N’est-elle pas la grande prêtresse mondiale de l’ère urbaine post COP21 ? N’a-t-elle pas testé dans la capitale toutes les politiques publiques à la mode Greta qui permettent de « conjuguer l’urgence climatique avec l’impératif d’égalité et d’inclusion » et n’est-elle pas la mieux placée pour les diffuser joyeusement dans toute la France ?

Ce serait oublier un peu vite que sa réélection s’est accompagnée d’une abstention fort désobligeante à son égard (63,3 %) qu’on mettra charitablement sur le compte de la pandémie de Covid-19. Sans compter qu’elle s’est déroulée dans un contexte où la médiocrité de son bilan a été opportunément éclipsée par la médiocrité et/ou les divisions et/ou les aventures sexuelles imprudentes des candidats concurrents.

Mais peut-être sont-ce justement ces considérations peu agréables qui la confortent dans le sentiment que la devise de Paris est faite pour elle. Jugée autoritaire et sectaire par une forte majorité de Parisiens dans un sondage OpinionWay de 2017, mille fois épinglée par la Chambre régionale des comptes d’Île-de-France pour sa mauvaise gestion (ici et ici par exemple), responsable d’une dette colossale qui devrait atteindre 7,1 milliards d’euros à la fin de l’année, elle navigue à vue, ballotée par les flots tumultueux de son idéologie et de son incompétence, mais elle ne coule pas. Après tout, qui est maire de Paris, sinon elle ?

Donc j’y reviens, Anne Hidalgo pense très fort à la présidentielle de 2022 et elle compte s’introduire dans la course via le lancement imminent d’une plateforme de « réflexion » intitulée Idées en commun sur le modèle de la formule Paris en commun qui l’a finalement plutôt bien servie pour les dernières municipales.

On devine déjà que les idées géniales vont fuser. Mais attention, méfiance vivement recommandée, car Hidalgo n’a jamais été en reste pour faire les promesses les plus extravagantes à ses électeurs avant les élections et revenir dessus quelques mois après avoir été élue.

En 2020, il était par exemple question de geler les impôts pour les six années à venir. Formidable ! On pouvait se douter que l’endettement serait mis à contribution, et c’est effectivement le cas, mais il faut croire que les finances de la ville, qualifiées de « parfaitement saines » pendant la campagne municipale, sont en réalité des plus préoccupantes et commencent à préoccuper Mme Hidalgo. Cette dernière a donc eu l’idée de proposer un relèvement des frais de notaire, de la taxe d’habitation sur les résidences secondaires, ainsi que de la taxe de séjour sur les locations Airbnb. Le tout habilement noyé dans un effet Covid bien pratique.

Les Parisiens pourront toujours se consoler en se disant que leur maire leur a offert au passage une petite leçon d’économie des plus utiles : toute dette publique sera impôt un jour. Mais peut-être n’imaginaient-ils pas que ce jour viendrait six mois à peine après l’élection. D’où une seconde leçon : de la part de politiciens avides de se faire élire, tout, absolument tout, est imaginable. Surtout le pire, l’absence de parole et le mensonge proféré sur le ton de la vérité.

Mais poursuivons. En 2020, il était également question de faire passer le budget participatif de la ville de 5 % à… 25 % du budget d’investissement. Rien que ça, d’un seul coup d’un seul ! Le racolage électoral n’a vraiment plus de limite :

Ah, comme elle est jolie, l’arnaque du budget participatif et citoyen ! Que tout le tralala de la « démocratie participative » soit une vitrine municipale et un système d’embrigadement au service de la longévité électorale des équipes en place avant d’être une prise en compte effective des avis des citoyens sur des sujets de vie quotidienne n’est pas un grand secret. 

Mais qu’un élu de premier plan revienne dessus seulement six mois après en avoir fait l’objet de promesses totalement délirantes, c’est déjà plus rare. Or c’est précisément ce que Mme Hidalgo est en train de faire. Avant les élections, rien n’était plus merveilleux que cette parfaite communion entre les citoyens et les élus pour transformer Paris en cité modèle du bien-être écologique et du vivre ensemble inclusif. Et il fallait bien évidemment étendre immédiatement le processus dans les grandes largeurs par accroissement du pouvoir décisionnel des habitants.

Mais voilà que la fine équipe municipale s’aperçoit soudainement, très soudainement, que tout fonctionne de travers alors que l’opposition s’égosille sans succès depuis longtemps pour dénoncer un système bancal qui relève de la « farce » :

· il suffit d’avoir une adresse mail pour voter, d’où multiplication des adresses numériques de petits groupes d’habitants très actifs qui veulent pousser leur projet ;
· il s’agit trop souvent de réaménager des squares ou d’installer à prix d’or des bacs à fleurs qui ne seront pas entretenus par la suite ;
· les choix des habitants ne sont pas toujours alignés avec les souhaits de la mairie ;
· les projets votés sont tellement nombreux que plus de la moitié d’entre eux ne sont pas menés à leur terme ;
· les budgets alloués sont opaques donc difficiles à contrôler ; 
· et tout ceci coûte quand même 100 millions d’euros par an dans le format 5 %.

Résultat des courses, Anne Hidalgo va proposer au prochain Conseil de Paris (qui se tiendra à partir de ce 2 février) que le niveau du budget participatif en reste aux 5 % qui était le sien avant les élections et que le système de vote soit revu avec la création d’une carte citoyenne permettant de participer au scrutin.

Mais surtout, les projets, moins nombreux, devront s’inscrire dans une thématique définie par la ville. Pour 2021, « imaginer le Paris de demain ». Original… Voyons le bon côté des choses : au moins ne demande-t-on pas aux Parisiens d’imaginer le Paris d’hier (encore que parfois, on se demande).

Quant au fait de revenir complètement sur une toute récente promesse de campagne qui figure au rang de totem dans les politiques municipales de gauche, Mme Hidalgo pense s’en tirer facilement en qualifiant de participatifs d’autres éléments de sa gestion municipale. 

Nul doute que la nébuleuse de la démocratie participative nécessite d’urgence un sérieux dépoussiérage, encore qu’on voie mal pourquoi il faudrait maintenir la fable clientéliste d’une quelconque « participation » des citoyens à la gestion de leur ville dans des projets entièrement balisés par les équipes municipales.

Mais s’agissant de Paris, le sujet vaut moins pour lui-même que pour démontrer une fois de plus qu’entre ce que dit Anne Hidalgo avant et ce qu’elle fait après, il existe un désastreux mélange de gestion anarchique, d’autocratisme et de dirigisme idéologique qui a poussé d’insolents journalistes à la rebaptiser Notre-Drame de Paris.

N’imaginez pas que cela puisse la décontenancer une seule seconde. Cela fait longtemps qu’elle a mis au point une parade sans réplique :  si d’aventure vous émettez une remarque un peu dubitative sur sa gestion, c’est très simple, vous appartenez d’évidence « à la fachosphère, aux réacs, aux néo-réacs, aux gros machos » qui lui en veulent à elle personnellement en tant que femme, d’origine étrangère et socialiste.

Alors après Paris, la France ? Ça promet.


Illustration de couverture : Anne Hidalgo à Paris en 2020. Photo AFP.

7 réflexions sur “HIDALGO : ce qu’elle promet… ce qu’elle fait… et 2022

  1. Malgré les casseroles, les retournements et la démagogie que votre article décrit fort à propos, Anne Hidalgo représente à ce jour l’atout le plus crédible de la gauche socialiste. Sans compte, qu’elle a réussi contre toute attente à se faire réélire à la mairie de Paris. Admettons-le, même si ça ne nous enchante guère, c’est une politico-politicienne hors-pair. Un savant mélange de François Mitterrand et de Nancy Pelosi.

    Les 9% d’intentions de vote qu’on lui prête ne signifient rien car ainsi que vous l’avez souligné, ce chiffre ne prend pas en compte ce que pourrait lui apporter le soutien du grand parti des abstentionnistes. Cette alliance a lui a si bien réussi dans le passé qu’elle aurait tort de ne pas compter à nouveau sur la non-mobilisation du plus grand parti de France.

    Les 9% s’expliquent également par le fait qu’Emmanuel Macron, un socialiste de centre gauche décrit à tort comme libéral, a asséché les votes modérés du parti en les captant à son avantage. Mais ceux qui se sont ralliés à lui hier peuvent très bien revenir dans le giron du parti socialiste, même si on en doute pour l’instant. Il suffirait d’un plongeon de sa côte de popularité, d’une hollandisation de son image.

    Ce qui peut empêcher Hidalgo d’accéder au second tour c’est l’énergie que met l’exécutif à polariser le débat autour du RN. Il est aidé en cela par la majorité des médias et experts de plateaux télés qui sont grassement payés pour orienter l’opinion dans le sens de l’inévitable duel Macron-Le Pen. Marine Le Pen a encore très peu de chances de gagner, et Macron le sait. Elle n’arrivera pas à accomplir l’exploit de toutes les campagnes présidentielles c’est à dire rassembler légèrement au delà de son camp.

    Et si par hasard sa popularité venait à s’envoler, la justice ne manquerait pas de réveiller certaines affaires dormantes comme celle des attachés parlementaires. Ca a tellement bien fonctionné pour disqualifier Fillon, ce serait tellement dommage de s’en priver. A droite, pour l’instant personne ne s’est distingué pour contrer les plans du gouvernements, même si LR regorge de personnalités de premier plan. Je ne pense pas aux différents présidents de régions, ceux-là n’ont aucune chance même s’ils se gargarisent du contraire.

  2. Sérieusement, Nathalie, qui en dehors d’elle, de sa coterie d’affidés et d’obligés et d’un quarteron de journalistes de gôche, imagine sérieusement une candidature autre que purement figurative ? Se présenter après la mise en œuvre de palettes de livraison sous toutes les formes possibles de « mobilier urbain » certes encouragée par les bobos à 15k€ le m2 minimum mais plutôt dignes de concurrencer les favelas sud-américaines que d’intéresser les gens à 1500€le m2 ???
    Quant à sa participation au débat d’idées, elle fait bien de lancer une plate-forme de suggestions vu la totale absence de sa part de formuler autre chose que les mantes Soces les plus éculés ou les plus à la dernière mode escrolo en attendant ceux du communisme en résurrection…

    • @Aristarkke je pense que nous aurons du mal à trouver des partisans d’Anne Hidalgo parmi nous, pourtant je pense qu’on doit reconnaitre à la maire de Paris une remarquable capacité d’atteindre des résultats électoraux, même si nous n’apprécions pas ses méthodes que personne d’ailleurs ne qualifie de populistes malgré la démagogie qui en constitue la trame de fond.

      Je me souviens des échecs retentissants du vélib, d’autolib, de la concession publicitaire au groupe Decaux, etc. Qui pensait qu’elle aurait pu s’en sortir avec de telles casseroles ? Pourtant, elle a su s’imposer face à LREM, face à LR, bref face à ceux qui étaient les mieux placés pour la battre. Ce n’est pas une adversaire facile.

      Je trouve qu’elle représente le risque le plus sérieux pour Macron non pas qu’elle puisse lui ravir la place, du moins pas pour l’instant, mais parce qu’elle est mesure de lui prendre suffisamment de voix pour l’empêcher de figurer au second tour. Et comme elle est déjà maire de Paris, il ne pourra pas lui offrir un baton de maréchal dans l’espoir de l’acheter. Par ailleurs, elle peut disposer du soutien du parti socialiste, un parti qui est encore ancré sur le terrain, qui dispose d’élus bien implantés ainsi que de quelques militants mobilisés. Est-ce que le parti présidentiel peut compter sur des militants ? J’en doute si j’en juge à ce que j’ai vu ces dernières années.

  3. Le fossé entre Paris et la Province s’est considérablement creusé ces dernières décennies et je ne suis pas convaincu qu’être maire de Paris soit un atout pour une élection nationale, ce serait même un handicap. Nous ne sommes plus au temps où Chirac était maire, mais celui-ci avait gardé un pied en Corrèze qui lui permettait de se montrer en train de tâter le cul des vaches et montrer ainsi qu’il avait gardé un lien autre que celui de la capitale. Hidalgo représente Paris dans tout ce que la province abhorre et je voudrais bien interroger un gilet jaune pour avoir son opinion sur cette dame.

  4. Je ferais deux remarques:
    Les idéologies socialistes et écologistes ne peuvent se concrétiser que par la dictature, et donc une politique participative pour les satisfaire est un contresens.
    D’autre part, l’élection présidentielle suppose la participation de tous les Français, et donc, même si les Parisiens finissent par se faire avoir, ce n’est peut-être pas le cas d’une majorité de Français. Croire qu’on peut être crédible pour la Présidence parce qu’on a été maire de Paris est une belle illusion. L’exemple de Chirac n’en est pas un car, lui, avait une accroche provinciale bien affirmée.

  5. Anne Hidalgo, c’est Ségolène Royal en plus hargneux. Les « budgets participatifs », qui ne sont nullement une exclusivité parisienne, sont une belle arnaque. Et je remarque que sur le tweet qui leur est consacré, le vote noir a prééminence sur les autres.

    C’est tout à fait un hasard, bien sûr.

  6. Je pense que vis-à-vis de la détestation. ambiante de Hidalgo, beaucoup n’ont pas assimilé le « À Rome, fais comme les romains » : vous n’habitez pas Paris intra-muros et vous ne pouvez pas penser comme un parisien intra-muros.

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