Le Média de Mélenchon ou l’info « en liberté » … surveillée !

Mise à jour du 22 août 2018 : Après des débuts chaotiques qui ne laissaient présager rien de bon, la Web TV des Insoumis « Le Média » tourne définitivement au règlement de comptes entre ses fondateurs et ses journalistes, aussi bien du point de vue éditorial que du point de vue financier. Un édifiant aperçu de « l’info en liberté » selon Mélenchon ! [Replay]


Avis aux lecteurs : 5 jours de vacances, 5 articles, 500 mots chacun environ. Voici le premier.

Comme souvent à gauche, tout avait commencé par une tribune dans Le Monde. Abondance de people et de politiciens en vue parmi les signataires, avalanche de bonnes intentions pluralistes, féministes, écologistes et antiracistes, originalité du financement par une multitude de membres appelés « socios », tout concourait sur le papier à faire de la nouvelle Web TV lancée mi-janvier dernier par Gérard Miller et Sophia Chikirou un « nouveau média citoyen » dont la perfection idéologique et économique ringardisait à jamais toute l’histoire de la presse et n’appelait à l’évidence qu’un seul nom : Le Média, what else ?

Mais très vite, le doute s’est installé. Ce nouveau média tout beau tout pluriel ne serait-il pas tout bêtement la télé de Mélenchon ? A regarder la liste des signataires de près, on voit que la France insoumise (FI) est largement au rendez-vous, à commencer par les fondateurs Sophia Chikirou et Gérard Miller. La première n’est autre que la conseillère com’ de Mélenchon et le second un de ses soutiens déclarés.

Sophia Chikirou n’a pas ménagé sa peine pour expliquer sur tous les plateaux télé que Le média n’avait rien, mais alors rien à voir avec Mélenchon ou la FI, mais quand on en vient à la ligne éditoriale, elle concède assez facilement que la Web TV ne sera pas le lieu du « Mélenchon bashing ». Quant à Mélenchon, il a envoyé un mail à tous les Insoumis pour les inciter à soutenir Le Média.

Ça fait beaucoup de mélenchonisme dans la balance. On sait d’ailleurs que Jean-Luc Mélenchon s’estime extrêmement mal traité par la presse traditionnelle et ses coups de gueule contre les journalistes sont célèbres. Que l’idée d’avoir son média personnel pour chanter ses louanges et diffuser sa bonne parole ait pu l’effleurer n’est pas pour étonner. Il ne ferait que suivre la voie d’Hugo Chavez dont on sait qu’il est un grand admirateur.

Quelques journalistes enthousiastes – et un peu naïfs, il faut le dire – se sont quand même lancés, trop sûrs de pouvoir bâtir un média de gauche en toute indépendance de la direction. La réalité, c’est que Sophia Chirikou passe son temps à exiger d’eux des rectifications, sur le Venezuela, sur la Syrie, sur Macron etc. Aujourd’hui, ils déchantent et quittent le navire. Révélateur, venant de journalistes de gauche.

C’est le cas d’Aude Rossigneux, première présentatrice du journal de 20 heures, dont on ne sait pas très bien si elle a été licenciée ou si sa période d’essai n’a pas été reconduite. Pour elle, et pour nous, la leçon de cette aventure est limpide :

« Toute cette histoire montre que j’ai eu un tort : vouloir à tout prix rester journaliste, là où on attendait de moi que je sois militante. »

.
Elle a été suivie encore ce week-end par de nombreux soutiens de la première heure dont certains jurent qu’ils ne « remettront plus les pieds dans cette chaîne de télévision ». Ambiance !

Le 20 heures du Média continue comme si de rien n’était. Il se prétend toujours « en liberté », mais preuve est faite qu’il s’agit d’une liberté très surveillée. 

On ne remerciera jamais assez Jean-Luc Mélenchon de nous avoir montré aussi clairement ce que deviendrait la liberté de la presse, la liberté tout court, s’il devait jamais arriver au pouvoir. Une perspective que la terrifiante expérience du Média contribuera peut-être à écarter pour de bon.


Le premier « 20 heures » du Média, le 15 janvier 2018  (30 minutes) :


Illustration de couverture : Le Média, Web TV de la France Insoumise et Jean-Luc Mélenchon.

15 réflexions sur “Le Média de Mélenchon ou l’info « en liberté » … surveillée !

  1. Merci pour ce papier édifiant sur ce « nouveau média ». J’avoue être totalement passé à côté de cette information qui a son importance tant elle révèle ce qui se cache derrière le mélenchonisme…

  2. C’est pas bien de se réjouir du malheur des autres, mais ça me fait quand même bien plaisir que des journalistes ouvertement de gauche se prennent leur propres méthodes dans la figure.

    La fameuse Aude Rossigneux, là, elle signe sa lettre de chochotte outragée, de journaliste à l’éthique irréprochable jusqu’au bout des ongles vernis, avec la formule « Salut et fraternité ». Formule d’extrême-gauche, lancée par les Conventionnels de la Révolution française, puis reprise par les anarchistes et les syndicalistes. Mais à part ça, c’est pas du tout une militante, elle est un monstre d’objectivité et elle a très mal à sa déontologie. Laissez-moi rire…

    On notera aussi qu’Aude Rossigneux est fille de deux journalistes travaillant au Canard enchaîné. Apparemment, le métier de journaliste se transmet par les gènes — surtout le métier de journaliste de gauche.

    Quant à la réunion où elle a été convoquée pour se faire virer, c’est un délice de voir le mélenchoniste Gérard Miller, psychanalyste télévisuel depuis perpète, se tortiller sur sa chaise pour lui annoncer les choses, en essayant de ne pas passer pour un sale patron capitaliste se débarrassant des camarades travailleurs exploités tels des Kleenex usagés.

    • Et les subventions pour garantir « la liberté de l’information face aux médias capitalistes » et « le pluralisme de la presse », Camarade, hein ? ça sert d’auto, comme les sacrements des curés ? 😉

      • Qu’avez-vous à reprocher à GW Goldnadel ? On peut aimer la verve, et la truculence d’où qu’elles viennent. Georges Marchais, oui, Philippe Martinez, réincarnation du beauf de Cabu, non. Ou alors au second degré. Le kwassa-kwassa pêche peu, il amène du Comorien. Notre Président par défaut (merci Marine Le Pen) sait manier la vanne, autant que la fiscalité redistributive.

      • @ Jean-Louis

        C’est à dire que ce serait à vous de justifier pourquoi Goldnadel n’a pas l’heur de vous plaire, et, mieux, cette tribune signée de sa main en particulier. A défaut, nous serions obligés de constater que vous vous référez à des Tables de la Loi politiquement correctes séparant les gens bien des gens pabien. J’ai l’honneur de vous informer que ces Tables n’existent que dans votre tête, et que vous n’impressionnez personne en utilisant ce procédé.

        En fait, ce genre de sortie désigne immanquablement que son auteur comme un homme dépourvu de tout argument, et tentant de la jouer à l’esbroufe. A l’école maternelle, ça peut marcher, peut-être.

  3. Ils ont appelé le Média parce que le terme Pravda était un peu trop voyant et usé.

    Quoique, il y a un bien un journal (?) appelé Libération, ce qui sous-entend que nous sommes occupés.

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  5. Je pense votre billet par trop caricatural, laissez le temps au temps pour juger.. Je ne sais pas qui vient lire vos papiers mais dès qu’il s’agit de Mélenchon vous voilà tête de gondole sur Google, au moins là il sert à quelque chose.. Mais si vous préférez les histoires à l’italienne avec l’arrivée au pouvoir de l’extrême droite, libre à vous…pour l’instant !! Le seul point où je me sens proche de vous est la Meige.

    • On parle Mélenchon, vous répondez extrême-droite, diversion typique d’une grande hypocrisie !
      Sachez que je ne me sens pas une seule seconde proche de Mélenchon, de même que je ne me sens pas une seule seconde proche de l’extrême-droite ainsi que je l’ai clairement dit dans mon A propos et dans divers articles sur Marine Le Pen et le FN, notamment avant la présidentielle.
      Et je crois me souvenir que pour le second tour de cette présidentielle, JLM a été assez « pudique » sur ses consignes de vote entre Macron et Le Pen.
      Pour ce qui est de la situation italienne, je la connais mal, je ne compte donc pas en parler.

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