La TAXE ZUCMAN ou l’apogée de la pensée MAGIQUE socialiste

Gros coup de pression en provenance de la gauche à propos de la taxe Zucman, ces derniers jours. Après la chute de François Bayrou, Matignon vient de passer sous la gouverne du macroniste Sébastien Lecornu, lequel espère sortir de l’impasse budgétaire actuelle en s’attirant les bonnes grâces du Parti socialiste (PS). Or l’introduction de ladite taxe dans le projet de loi de finances pour 2026 fait justement partie des conditions exigées par le PS pour considérer le futur gouvernement sans trop d’hostilité.

Résultat, l’économiste français Gabriel Zucman, initiateur de cette taxe qui porte maintenant son nom, a passé toute la semaine dernière à en faire la promotion dans les médias (FranceInfo, Le Monde et TF1, par exemple).

Mais pour commencer, de qui parle-t-on ?

Né en 1986 à Paris, Gabriel Zucman est un économiste français spécialisé dans l’étude des inégalités de revenus et l’évasion fiscale – à noter que pour lui, l’optimisation fiscale est aussi blâmable qu’une évasion frauduleuse. Il a rédigé sa thèse de doctorat sous la direction de notre star mondiale de l’économie Thomas Piketty et a ensuite poursuivi ses recherches avec lui. Ce qui ne manque pas de donner une petite idée de l’orientation de ses travaux.

Il a enseigné à la London School of Economics et à l’université californienne de Berkeley et il enseigne maintenant à l’École nationale supérieure de la rue d’Ulm. Parallèlement, il a conseillé les candidats démocrates les plus à gauche Bernie Sanders et Elizabeth Warren lors des primaires pour l’élection présidentielle américaine de 2020 et il a soutenu le programme économique de la NUPES (LFI, Verts, PCF et PS) lors des élections législatives françaises de 2022. Ce qui ne manque pas de confirmer la petite idée que l’on peut se faire de l’orientation de ses travaux.

Et maintenant, de quoi s’agit-il ?

De dire premièrement que si la France est en train de s’abîmer gravement dans la dette publique, c’est uniquement parce qu’elle est en manque impérieux de recettes fiscales ; de dire ensuite que les ultra-riches sont proportionnellement deux fois moins taxés que la moyenne des Français ; et de proposer en conséquence une taxation plancher de 2 % sur le patrimoine total (immobilier, financier ET professionnel) des foyers fiscaux dès lors que cette fortune dépasse 100 millions d’euros. « Et professionnel », c’est-à-dire en incluant dans le patrimoine des ultra-riches la valorisation de leur outil de travail, lequel acquitte déjà chaque année l’impôt sur les sociétés (IS) et une multitude de taxes et impôts de production.

Quant au fonctionnement de la taxe, il serait très simple. Si votre patrimoine tout compris atteint le seuil des 100 millions d’euros, vous devrez acquitter au fisc au moins 2 % de cette valeur, soit 2 millions d’euros. Dans le cas où vos impôts et taxes de l’année, calculés selon les règles fiscales en vigueur (IFI, IRPP, contribution additionnelle sur les hauts revenus, taxe foncière, CSG, CRDS , IFU sur les revenus des capitaux, et tout le reste), ne se monteraient qu’à 1,5 million d’euros, vous seriez redevable d’une surtaxe de 500 000 euros au titre de la taxe Zucman. Il s’agit en effet d’une taxe additionnelle qui concernerait 1 800 foyers fiscaux et pourrait rapporter environ 20 milliards d’euros chaque année, selon les dires de ses promoteurs.

Évidemment, même si Gabriel Zucman estime que l’exil fiscal résultant de ce nouvel impôt serait minime, il préférerait voir le système étendu à l’ensemble du monde, à tout le moins au G20, et il préconise en outre de prévoir un dispositif permettant au fisc de taxer les riches exilés fiscaux pendant cinq ou dix ans après leur départ. En fait, loin de s’inquiéter des effets négatifs possibles de sa taxe, il ne voit que de bonnes raisons d’adopter une fiscalité progressive qui, partant de 2 %, pourrait monter jusqu’à 8 % du patrimoine total, comme cela avait été proposé par Bernie Sanders aux États-Unis.

Intermède burlesque

Si les Français eux-mêmes pouvaient être intimement convaincus des bienfaits de la taxe Zucman, tant pour l’équilibre des comptes publics que pour l’équité fiscale qu’elle prétend renforcer, quelle aubaine ce serait pour la gauche ! C’est pourquoi la semaine dernière, la planète médiatique a vu aussi d’éminents représentants des partis de gauche apporter bruyamment leur soutien aux thèses de Gabriel Zucman.

Exercice qui a rapidement viré à la farce, tant il est apparu que même quand on est le président de la commission des Finances de l’Assemblée nationale comme Éric Coquerel (LFI) ou quand on est un député distingué du mouvement socialiste Place publique comme Aurélien Rousseau, on ne maîtrise pas forcément les notions de base de l’économie.

Le premier, interrogé sur le cas particulier du patron de Mistral AI, dont l’entreprise est valorisée 14 milliards d’euros mais ne fait pas de bénéfices, répond qu’il ne paiera pas la taxe puisqu’il ne gagne pas d’argent – ne comprenant manifestement pas que les 2 % s’appliqueraient à un patrimoine, y compris les parts détenues dans Mistral AI, et pas à des revenus annuels. Il n’est certes pas le premier politicien à ne rien comprendre aux notions de stocks et de flux, aux notions de patrimoine et de revenu, mais tout de même…

Quant au second, il défend hautement l’idée qu’il faut remettre de l’argent dans le circuit économique pour la croissance, pour l’emploi, etc. Jusque-là, tout va bien, mais attention, ça se gâte : il ne trouve ensuite rien de mieux à faire que de s’insurger tout aussi hautement contre le fait que des chefs d’entreprise comme Xavier Niel investissent leurs ressources dans d’autres entreprises ou la leur, oubliant complètement que leur création de richesse va ainsi permettre à leur entreprise ou à d’autres d’innover et de se développer grâce à de nouveaux apports en capitaux !

Il est sidérant de constater une fois de plus que, pour la vaste majorité des politiciens français, l’idée de « remettre de l’argent dans le circuit économique » passe obligatoirement par de juteux prélèvements fiscaux qui seront dépensés sans compter au niveau étatique dans de grands plans France 2030, 50 ou 100 dont la Cour des comptes égrènera d’année en année les gabegies et les échecs, comme elle le fait pour toutes les dépenses publiques depuis des décennies. Les investissements librement réalisés par un entrepreneur ne comptent pas. Comme le déplorait récemment la députée européenne Chloé Ridel (PS), cet entrepreneur a le culot d’investir dans ce qu’il choisit, pas dans ce que l’État donne comme priorité. C’est horrible !

Finalement, que penser de tout cela ?

1. La France manque-t-elle de recettes fiscales ?

Pas d’erreur, la dette publique française a bien atteint la somme faramineuse de 3 345 milliards d’euros à la fin du premier trimestre 2025, ce qui correspond maintenant à 114 % du PIB. Le déficit public fut bien de 5,8 % en 2024 et rien n’indique à ce stade que le retour à 5,4 % prévu pour 2025 dans le PLF Bayrou sera tenu.

L’erreur, ou la cécité, de Zucman et consorts consiste cependant à expliquer ce dérapage continu par une crise des recettes. Mais comme le rappelait l’agence de notation Fitch pas plus tard que vendredi 12 septembre dernier dans son avis de dégradation de la note de l’État français (de AA- à A+), la France a déjà le plus haut ratio européen de prélèvements obligatoires par rapport au PIB, soit 45,6 % quand la moyenne de l’Union européenne est à 40 %.

Côté dépenses, en revanche… 57 % du PIB… La France se trouve aujourd’hui prise au piège d’un modèle économique et social dirigiste, collectif et redistributif que les actifs actuels ne parviennent plus à faire vivre alors que la tentation des grands plans industriels souverains est vive et que les besoins de financement des retraites et de la santé sont plus élevés que jamais. 

2. Les ultra-riches paient-ils beaucoup moins d’impôts que l’ensemble des Français ?

Piketty, Zucman à sa suite, et encore tout récemment l’Institut des politiques publiques (IPP, 2023) ne parviennent à cette conclusion qu’après avoir considérablement altéré le sens du mot « revenu » et après avoir complètement et opportunément « oublié » que le système français est fortement redistributif.

À la somme que tout contribuable connaît comme formant son revenu fiscal (salaires, pensions, loyers, intérêts encaissés, dividendes encaissés, plus-values réalisées, dont sont déduits un certain nombre de charges et abattements), nos auteurs ont préféré s’intéresser à un autre revenu, le revenu dit « économique ». Il est composé du revenu fiscal classique, mais s’y ajoute le bénéfice non distribué des sociétés détenues par le contribuable. Autrement dit, des sommes qui ne sont pas encore matérialisées dans le revenu palpable des foyers fiscaux concernés. Des sommes qui pour la plupart seront réinvesties dans l’entreprise pour assurer son développement et innover.

Dans ces conditions très aménagées, les chercheurs de l’IPP estiment avoir établi une vérité jusque-là cachée de la vie des milliardaires : ils ne paient presque pas d’impôts compte tenu de leurs revenus redressés (voir schémas ci-dessous) :

« Nous documentons que le taux effectif d’imposition, tous impôts directs compris, est progressif jusqu’à des niveaux élevés de revenus, y compris pour la majorité des 1 % de revenus les plus hauts. Mais au sein des 0,1 % des foyers fiscaux les plus riches, le taux d’imposition global devient régressif, passant de 46 % pour les 0,1 % les plus riches, à 26 % pour les 0,0002 % les plus riches (les ‘milliardaires’). »

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Taux d’imposition totaux rapportés : au revenu fiscal (à gauche, graphique a) et au revenu économique (à droite, graphique b) – cliquer pour agrandir.

Vous remarquerez que ces graphiques ne concernent que le taux d’imposition des 90 % les plus riches (en abscisse).

Si l’on s’intéressait à tous les foyers fiscaux français, on remarquerait, comme le fait une étude de l’INSEE de 2023 dont j’ai déjà parlé ici et ici, que l’écart de revenu entre les 13 % les plus pauvres et les 10 % les plus aisés est de 1 à 18 avant transferts élargis et qu’il se rétracte à un rapport de 1 à 3 après transferts élargis, ainsi que le montre très clairement le schéma ci-contre.

Autrement dit, les 13 % les plus pauvres sont bénéficiaires nets du système. (À noter que les transferts élargis comprennent les transferts financiers, c’est-à-dire toutes les prestations sociales et les retraites, et intègrent également la valorisation des services publics – les individuels tels que santé et éducation, et les collectifs tels que défense ou recherche).

De ce fait on comprend mal comment Thomas Piketty peut attribuer un taux d’imposition sur le revenu de 40 % aux 10 % les plus pauvres comme il le fait dans un graphe (voir ci-dessous) de son ouvrage Pour une révolution fiscale co-écrit en 2011 avec les chercheurs Camille Landais et Emmanuel Saez. La TVA, payée par tous les consommateurs et incluse dans les prélèvements considérés dans ce graphe, n’explique pas tout, sauf à la rapporter très cavalièrement au seul revenu fiscal, sans tenir compte des prestations sociales qui ont aussi donné lieu à de la consommation, donc à de la TVA. Précisément ce qu’ont fait sans sourciller les trois auteurs de cet ouvrage.

Or c’est justement ce graphe des plus douteux que Gabriel Zucman a repris récemment sur X (ex-Twitter) pour soutenir ses théories fiscales, ainsi que l’a parfaitement remarqué et judicieusement commenté un autre économiste, Gille Raveaud.

3. Et la taxe Zucman : stop, ou encore ?

À propos de la taxe elle-même, on pourrait dire que ce ne sont pas ses 20 milliards de recettes annuelles attendues (si tout se passe bien, ce qui n’est nullement acquis) qui pourront éponger les 160 milliards de déficit public prévus dans le budget Bayrou pour 2025. 

Mais le simple fait qu’elle soit devenue un sujet de premier plan dans le débat public français, le simple fait qu’une multitude de parlementaires s’y intéressent, jusqu’au Rassemblement national qui compte bien s’attaquer à tout ce qui est rente, spéculation, superprofits et surdividendes – tout cela donne nettement l’impression que tout est fait pour éviter de voir l’ampleur de notre vrai problème : celui d’un modèle économique et social à bout de souffle, c’est-à-dire complètement incapable de délivrer des prestations à la hauteur des prélèvements obligatoires toujours plus exorbitants exigés des contribuables.

Peu importe aux Coquerel, Zucman, Rousseau et compagnie que le problème de la dette française provienne des dépenses publiques et donc de notre sacro-saint modèle social ; peu importe que les ultra-riches soient en fait les premiers contributeurs de l’égalitarisme maladif qui ronge la France ; peu importe finalement que toutes les actions entreprises en France dans un état d’esprit socialiste aient dégradé les capacités éducatives, sanitaires et économiques du pays ; peu importe que l’instauration d’une telle taxe fragilise le tissu productif français et nuise aux facultés d’adaptation du pays aux technologies d’avenir ; peu importe que les entreprises soient un peu plus découragées et entravées dans leurs facultés de croissance, donc dans leur capacité à fournir des emplois et à augmenter les salaires – l’important, c’est la lutte finale et la lutte finale, c’est l’égalité pure et parfaite, y compris et surtout dans le déclin de notre prospérité.

De ce fait, fondée sur des bases théoriques plus que branlantes, la taxe Zucman me semble être une énième version du mantra habituel de la gauche qui a domestiqué toute la pensée politique de ce pays : dépenser sans compter pour faire advenir l’homme nouveau de la révolution socialiste… et taxer les riches, comme d’habitude, même si Gabriel Zucman se flatte que sa taxe illustre une façon complètement inédite de faire avancer le bien commun :

Pour ma part, je ne vois pas de plus forte répétition du passé que l’éventuelle instauration de la taxe Zucman. Elle s’inscrit dans la droite ligne des nationalisations et de l’impôt sur les grandes fortunes de François Mitterrand à partir de 1981, avec l’immense succès que l’on sait. Et je ne vois pas de plus désolante « pensée magique » que ces solutions fiscales miracles qui reviennent toujours à taxer les riches et qui n’ont finalement pas d’autre résultat que de pousser à toujours plus de dépenses publiques. Une course sans fin, qui s’achèvera lorsque l’argent des autres, comme disait Margaret Thatcher, viendra à manquer.


Illustration de couverture : l’économiste Gabriel Zucman. Photo AFP.

12 réflexions sur “La TAXE ZUCMAN ou l’apogée de la pensée MAGIQUE socialiste

  1. Je suis en pleine création de startup. Quand j’ai entendu parler de cette ineptie, je me suis dit qu’il fallait que je parte.

    Marc Touati qui luttent comme vous mais sur YouTube a fait le calcul de déficit entre les impôts et les dépenses et non pas le PIB. Le déficit est de plus de 45%.

    Merci Madame pour ce remarquable condensé, cela a dû vous coûter de plonger dans les arcanes des « économistes » de gauche.

  2. Oui ce projet de taxe Zucman est une véritable catastrophe potentielle pour nos entrepreneurs, notamment de la Tech. Zucman qui n’a jamais rien crée comme richesse et d’emplois nous donne des leçons du haut de sa science militante. Et bien évidemment, la gauche est bien trop heureuse de se saisir de cette taxe concoctée par un grand scientifique !

  3. Pour commencer une taxe sur le patrimoine est similaire à une spoliation contraire à la Déclaration des droits de l’homme, article 17, toute personne, aussi bien seule qu’en collectivité, a droit à la propriété, nul ne peut être arbitrairement privé de sa propriété.

    Dans le bain d’ignorance feinte ou entretenue à dessein, le patrimoine serait des châteaux ou une caisse d’or bien cachée. Or ce sont majoritairement des capitaux investis dont les valeurs sont très largement dépendant de la confiance et des profits espérés.
    Pour mémoire, dans les heures qui suivent l’élection de Mitterrand, près de quarante valeurs chutent de plus de 30% sur la place de Paris. Bis, Ecco, Matra, Compagnie Bancaire, Cetelem, perdent même plus de la moitié de leur valeur.
    On peut attendre le même genre d’effets avec la taxe Zucman à court ou à moyen terme donc le contraire espéré, soit une baisse vertigineuse des recettes.

    Et il reste toujours en vigueur dans ces fins esprits la théorie de Keynes qui avait calculé qu’une augmentation de la dette se transformait toujours en une augmentation du PIB plus forte que la croissance de la dette sur les années suivantes. Cela a été vrai à certains moments précis, reconstruction après guerre par exemple, ce n’est plus vrai aujourd’hui. La croissance va continuer à s’effondrer. Le multiplicateur Keynésien est devenu un diviseur Keynésien et cela depuis 15 ans. Plus l’Etat Français s’endette, et plus le pays s’appauvrit. La seule façon de faire monter le PIB est de faire baisser les dépenses de l’Etat.
    Illustration graphique, dette en rouge PIB en bleu :
    https://institutdeslibertes.org/wp-content/uploads/2025/09/multiplicateur.png

    20 milliards de recettes alors qu’il en faudrait 200 pour avoir un budget excédentaire et commencer à faire baisser la dette !!!
    Rappel : Une dette qui augmente pour fonctionner et pas pour investir.

  4. les politiciens ont menti depuis l’apres-guerre. Un systeme qui se base sur le jeu de l’avion ou ponzi s’ecroule toujours.
    1. La pension par capitalisation
    2. les soins de sante
    3. la sclerose de la fonction publique ou on s’accroche a un cadre qui ne reconnait pas l’impact des avancees technologiques et donc ne genere aucune amelioration de productivite tout en augmentant la charge administrative car l’administration n’a pour vocation que de se perpetuer

  5. Le « Patrimoine professionnel » sur lequel la taxe Zucman (Ztax pour simplifier) serait appliquée peut être défini de plusieurs façons :
    – Option stricte (actifs productifs) : immobilisations corporelles (bâtiments, machines, outillage) ± immobilisations incorporelles (brevets, fonds de commerce)
    ce sont les entreprises de taille intermédiaire (ETI) qui sont concernées : → ordre de grandeur : ~130 millions € / ETI (moyenne 2019, immobilisations corporelles seules). [Insee]
    – Option large (patrimoine comptable total de l’entreprise) : total de bilan (inclut actifs non financiers, créances, disponibilités, mais aussi éléments financiers) → ordre de grandeur : ~380 millions € / ETI (moyenne 2019) [Insee]
    Autrement dit, selon la définition retenue, le « patrimoine professionnel moyen » des ETI en France (2019) se situe vraisemblablement entre ≈ 130 M€ et ≈ 380 M€ par entreprise, la borne basse correspondant aux seuls actifs productifs corporels, la borne haute au total de bilan comptable. La Ztax se basera sans doute entre les deux : environ 255 M€.
    Les ETI soit environ 5700 entreprises présentent trois caractéristiques principales :
    – elles sont fortement présentes dans l’industrie, largement exportatrices et majoritairement indépendantes.
    – 1/3 des ETI emploient plus de 500 salariés, près de 250 ETI emploient plus de 2 000 salariés
    – 69% des ETI sont contrôlées par des capitaux majoritairement français, au sein des ETI sous contrôle français (ETIF), 70% ont un actionnariat familial.
    Nettement exportatrices (leurs ventes hors de France représentent entre 50 à 90% de leur CA), les ETI restent ancrées dans les territoires : 78 % de leurs sites de production se situent en dehors de la région parisienne.
    – 38 % des salariés de l’industrie manufacturière travaillent dans des ETI. Les ETI favorisent autour d’elles, sur leur territoire, un écosystème de TPE et de PME sous-traitantes et partenaires.
    – 23 % des dépenses privée de recherche et développement (R&D) se font au sein des ETI.
    – Plus de 500 ETI sont leaders européens et mondiaux dans leur domaine.
    Prenons une ETI moyenne option stricte : elle va payer une Ztax de 2 % x 255 M€ : 5,1 M€. Autrement dit l’effectif moyen d’une ETIF étant de 660 collaborateurs elle va payer cash l’équivalent de deux mois de salaires (charges comprises) à l’état, alors que 25 % des d’entre elles font face à des problèmes de liquidité et de fonds propres notamment pour investir et durer.
    Les impôts de production restent six fois supérieurs à ceux de l’Allemagne, et la complexité des dispositifs réglementaires et fiscaux immobilise un nombre croissant d’emplois administratifs (en France deux à trois fois plus en moyenne pour ce type d’entreprise que pour la moyenne européenne).
    Alors que l’on arrête pas de gloser sur la réindustrialisation nécessaire, comment faire tout le contraire… »La France comptait le même nombre d’ETI que la RFA en 1980; elle en compte deux fois moins que l’Allemagne aujourd’hui » (Frédéric Coirier).

    • @Nemo: J’étais sur le point de me lancer dans une de ces comparaisons un peu nostalgiques entre les anciens et les nouveaux socialistes, ceux d’avant, pour qui « l’économie sociale de marché » impliquait encore un peu de marché, un soupçon de profit, et accessoirement des entreprises vivantes. Des politiciens d’un autre temps, avec des convictions, des principes, un sens de l’honneur qui transpirait de leurs rapports signés Ricard et de leurs verres de Rocard.
      Puis je me suis souvenu qu’on tient exactement le même discours sur la pègre marseillaise.

    • Merci de rappeler que les ETI françaises ont payé un lourd tribu aux inconséquences de nos politiques économiques alors qu’elles sont si importantes. L’Italie et l’Allemagne ont effectivement conservé un riche tissu d’ETI contrairement à la France.

  6. Ce que j’aime dans les articles de Nathalie, c’est cette façon qu’elle a de disséquer les discours avec la patience d’un démineur culinaire désamorçant les quiches néo-marxistes qui officient à l’université. Elle épluche les strates de bobards, elle tranche, elle dégraisse jusqu’à atteindre le noyau central, une espèce de résidu fibreux, compact et sec : le fond de tarte mental dans lequel macèrent, dans leur bouillon brunâtre, les mégots du fumeux cendrier Piketty.

    Merci infiniment, Nathalie. Votre travail est précieux !

    Et dire que ce Zucman est professeur d’économie à Normale Sup ! Ça explique peut-être ce constat que tout un chacun peut faire sur le terrain : parmi tous les enseignants de gauche radicale qui militent ouvertement en classe (si, si , il y en a, pas la majorité certes, mais ils sont bruyants), les plus convaincus, les plus prosélytes, mais aussi, les plus insolites, au sens baroque du terme, sont les profs de français. On dit que le droit mène à tout, on devrait ajouter que la grammaire mène parfois à des impasses.

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