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EELV déclare : « J’ai un pull troué, je sauve le climat »

Mise à jour du mardi 21 juillet 2015 : Le « Sommet des consciences pour le climat » qui s’est tenu aujourd’hui à l’instigation de Nicolas Hulot en la présence du chef de l’État m’incite à remettre cet article en avant. Si la future conférence de Paris COP21 était déjà l’objet de toutes les révérences gouvernementales et écolos, elle baigne maintenant dans le délire mystique le plus total, comme électrisée par l’encyclique pontificale Laudato Si‘ publiée récemment par le pape François. 

Grâce à des amis qui poussent l’abnégation citoyenne jusqu’à « liker » la page Facebook d’Europe Ecologie Les Verts (ou EELV), j’ai découvert quelques photos très amusantes et très vertes d’une petite sauterie organisée hier après-midi par notre parti écologiste national en l’honneur de son lancement de la COP21. En voici une sélection ci-dessous. 


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Vous constaterez qu’elles sont en effet très vertes, et vous constaterez aussi qu’on y lit bien « J’ai un pull troué, je sauve le climat » comme je l’annonçais en titre. Ne sont pas oubliées quelques autres maximes pleines de sagesse militante et partisane telles que « Je vote écolo, je sauve le climat » ou « J’aime les abeilles, je sauve le climat », cette dernière formule visant soit à faire plaisir à Ségolène Royal, soit plus probablement à lui dénier le monopole du cœur sur les abeilles.

Dans un précédent article relatant le voyage de François Hollande aux Philippines avec les actrices Marion Cotillard et Mélanie Laurent afin de faire la promotion de cette fameuse COP21, j’avais eu l’occasion d’expliquer qu’il s’agissait de la 21ème Conférence des Nations unies sur les changements climatiques, qu’elle se déroulerait début décembre 2015 à Paris (au Bourget) et qu’elle avait l’objectif de parvenir à un accord international sur le climat, applicable à tous les pays, afin de maintenir le réchauffement mondial en deçà de 2°C.

La mention « tous les pays » signifie que les pays émergents sont très fortement invités à se rallier à la grande cause climatique. Ce n’était pas acquis auparavant et la réticence de ces pays avait été la pierre d’achoppement de plusieurs conférences antérieures sur le climat.

Quand je dis « sauterie » en parlant du rassemblement organisé hier par EELV, c’est parce que je me laisse abuser par le côté après-midi costumé pour enfants du primaire auquel cette réunion potache et turbulente me fait irrésistiblement penser. Je me rappelle fort bien avoir participé à un amusement de ce genre déguisée en champignon. C’était dans les années 1970, psychédéliques à souhait. Aujourd’hui, on a pour ainsi dire basculé dans l’après 2012 et rien ne peut plus être comme avant. Finies la faune et la flore (sauf les abeilles), bonjour l’anaphore(*) !

Et de ce côté-là, EELV n’a pas ménagé sa peine. Grâce à un générateur de tracts, nous sommes tous appelés à être créatifs pour sauver le climat. Cécile Duflot a opté pour « J’aime les loutres, je sauve le climat » tandis qu’Emmanuelle Cosse a préféré « En co-voiturage, je sauve le climat. » Et pourquoi pas « Je fais des pancartes, je sauve le climat » ? Et pourquoi pas « Je suis Charlie, je sauve le climat » ?

On devine sans peine qu’à travers une telle débauche d’anaphores il est question soit de faire plaisir à François Hollande, grand maître en la matière, soit plus probablement de lui dénier le monopole du cœur sur les anaphores.

Donc ce lancement de la COP21 par les Verts a toutes les apparences d’un divertissement sans conséquence, mais en réalité, c’est la guerre. Il suffit de se rendre sur le site internet d’EELV pour comprendre que l’heure n’est pas du tout à la rigolade, contrairement à ce qu’on pourrait s’imaginer en voyant les mines et les affichettes des militants écolos mobilisés pour l’occasion. Le parti écologiste a purement et simplement « décrété la mobilisation générale » pour gagner la « bataille de Paris ». Il est impératif d’aboutir car autrement c’est la catastrophe assurée.

Les idées c’est bien, mais la mobilisation citoyenne, c’est encore mieux. Selon Pascal Canfin, ancien ministre, le moment semble opportun pour parvenir à un accord. Pour lui, le monde est à un tournant : les énergies renouvelables sont peu à peu en train de gagner le match contre le charbon, et les pays émergents n’ont plus de surcoût à s’engager contre le changement climatique. Donc il n’y a plus à hésiter. C’est le moment de faire des pancartes.

Dans l’article cité plus haut, j’explique ce que je pense de cette affaire de climat : compte tenu du plateau de températures qu’on observe depuis 1998, compte tenu de nombreuses autres anomalies, il est très exagéré de vouloir faire croire aux citoyens, souvent contribuables du reste, que sur ce sujet « la science est établie » comme on a coutume de l’entendre dire. Je ne reviens donc pas sur les arguments qui mettent à mal les thèses réchauffistes. Je conseille toutefois la visite du site des Climato-réalistes qui tient à jour l’analyse des rapports du GIEC et fait le point régulier sur la recherche dans le domaine du climat.

Je ne sais pas si le climat sera sauvé en décembre lors de la Conférence de Paris, mais grâce à cette campagne citoyenne, on en apprend d’ores et déjà beaucoup sur le profil type du militant écologiste. Tout d’abord, il fait des pancartes. C’est normal, c’est un citoyen qui se mobilise, donc il fait des pancartes commençant par « je ». « Je suis le climat », nous dit-il, un sanglot désespéré dans la voix, je suis ce climat anéanti par la terreur meurtrière de la croissance, du capital et du profit. « Avec ses petits bras » et son grand coeur désintéressé, il veut tout faire pour sauver le climat. Il fera tout, il ira même jusqu’à faire des pancartes.

Ensuite, il mange du tofu, il mange bio et il mange local, donc très certainement du tofu local bio. Non merci, sans façon… Bien sûr, il fait du vélo, prend le métro et pratique le co-voiturage. Il aime les abeilles, les loutres et les koalas. Très chic, tout ça. Nous autres, tristes individus ordinaires, nous aimons bêtement les chiens et les chats. On ne va pas sauver le climat comme ça.

Conscient de l’importance des enjeux économiques, il crée des emplois et éteint la lumière, et quand il travaille, c’est sous linux uniquement. Quand il prend des vacances, en été par exemple, il sauve le climat. Et enfin, côté mode vestimentaire, il porte des pulls troués, et là encore, je vous le donne en mille, il sauve le climat. Quel homme !

Reste une question non élucidée.

Que peuvent bien vouloir nous dire cette dame et EELV avec cette formule mystérieuse « Ce soir je peux pas, je sauve le climat » ?

Est-ce une sorte de lapsus révélateur subliminal par lequel il faut comprendre :

· Ce soir je peux pas sortir les poubelles (et faire ce foutu tri).
· Ce soir je peux pas, j’ai déjà un dîner de prévu (et je sais qu’on n’y mangera pas du tofu, ouf).
· Ce soir je peux pas, l’Emir du Qatar m’a invitée à un baptême de l’air (pollué) dans son nouveau rafale.
· Ce soir je peux pas, je fais du scooter (même pas électrique) avec François Hollande, etc… et je n’ai pas très envie de sauver le climat.

Ou bien faut-il comprendre que le sauvetage du climat, de la planète, de l’univers, voyons grand, faut-il comprendre que tout cela fatigue énormément, que tout cela exige une telle dévotion, que le soir c’est plus souvent migraine et dizaine de chapelets écolo que je t’aime je t’aime again and again ?

              


(*) Un lecteur m’a signalé en commentaire, et je l’en remercie, qu’il s’agit ici non d’anaphores, qui commencent les phrases, mais d’épiphores, qui les finissent. « Epi », ça fait tout de suite plus écolo, surtout si c’est sans OGM !


Illustration de couverture et photos : compte Facebook de EELV et « générateur » de tracts EELV pour les deux affichettes ci-dessus.

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