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Macron : deux ans d’efforts étatistes bien mal récompensés !

Il y a deux ans, le 7 mai 2017, Emmanuel Macron devenait Président. On peut saluer la performance personnelle : il avait moins de 40 ans, il n’avait jamais été élu auparavant, son entrée en politique, datant de la campagne électorale de François Hollande, était relativement récente et son mouvement En Marche ! existait depuis un an seulement. Une folle ascension s’il en est ! Mais les motifs de congratulation s’arrêtent là car Emmanuel Macron fut en réalité plutôt mal élu.

Le « printemps » macronien annoncé à grand renfort de dépassement des clivages et de discours flous mais enthousiastes – et, il faut le dire, bien aidé par la victoire de Benoît Hamon à la primaire de gauche et l’affaire des emplois présumés fictifs de Penelope Fillon – a certes contribué à faire souffler un agréable vent de « dégagisme » sur tous les Juppé, Sarkozy, Fillon, Hollande, Valls, Mélenchon, Le Pen… – bref, sur tous ces politiciens sans qualité qui monopolisent le paysage politique français depuis trop longtemps sans qu’on discerne clairement en quoi ils agissent en faveur du pays.

Mais il n’empêche que cette élection présidentielle s’est caractérisée par une abstention inhabituellement élevée et un nombre considérable de bulletins blancs ou nuls. Il en résulte que si Emmanuel Macron a réuni 66 % des suffrages exprimés au second tour, ce taux tombe à 44 % quand on considère l’ensemble des inscrits. C’était évidemment plus que ce à quoi pouvaient prétendre ses adversaires du premier ou du second tour, mais cela restait faible en termes d’adhésion des Français envers sa personne et son programme.

C’est ainsi que, d’après le baromètre politique Ipsos-Le Point, Emmanuel Macron a commencé son quinquennat avec un taux de popularité de 46 % : un score médiocre pour un nouveau Président en état de grâce, mais en réalité très cohérent avec le résultat des élections.

Aujourd’hui, le même institut de sondage nous dit que la popularité présidentielle est tombée à 27 %, même si elle enregistre un petit mieux après le creux à 20 % de décembre 2018, au cœur du mouvement initial des Gilets jaunes contre la politique taxatoire du gouvernement.

Il faudra regarder comment tout ceci évolue et si le parti présidentiel sera en mesure d’obtenir le premier rang lors des élections européennes du 26 mai prochain, mais permettez-moi de trouver que du point de vue des aspirations majoritaires des Français, cette évaluation sévère et persistante de l’action du Président semble terriblement injuste !

Lors de la conférence de presse qu’il a donnée le 25 avril dernier pour tirer les conclusions du Grand débat national, Emmanuel Macron n’a-t-il pas déclaré son attachement profond à toutes les spécificités de notre modèle économique et social basé sur la dépense publique et la redistribution ?

N’a-t-il pas défini la France comme une force morale supérieure opposée à la marche du monde et fière de l’être :

« L’art d’être français (…), c’est, très profondément, décider de ne pas nous adapter au monde qui nous échappe, de ne pas céder à la loi du plus fort, mais bien de porter un projet de résistance (…) » ?

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N’a-t-il pas confirmé clairement ce que les Français adorent penser, et qu’il exprimait déjà dans la « Lettre » qu’il leur avait adressée en janvier pour lancer le Grand débat, à savoir que :

« La France n’est pas un pays comme les autres. Le sens des injustices y est plus vif qu’ailleurs. L’exigence d’entraide et de solidarité plus forte » ?

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« Chez nous »,
avait-il souligné alors, la santé, l’éducation, la justice, etc. sont accessibles à tous, la retraite est payée par ceux qui travaillent et les accidents de la vie comme le chômage peuvent être surmontés grâce à la solidarité de tous.

Comme si, chez les autres, chez les Allemands, les Néerlandais ou les Britanniques, les accès à l’éducation, à la justice, à la santé étaient… limités ! Comme si, chez eux, le chômage ne pouvait être surmonté ! – Je laisse bêtement mon surmoi libéral s’exprimer mais c’est hors de propos. Dans leur grande majorité, les Français sont convaincus que si les chômages allemand ou néerlandais sont sous les 5 %, c’est parce que l’emploi n’est que précarité et « contrats à 1 € ». Et si ces pays ont des excédents budgétaires, c’est parce qu’ils laissent leurs populations vivre dans des conditions médicales, sociales et éducatives honteuses.

Mais reprenons. Emmanuel Macron ne s’est-il pas empressé de traduire cette merveilleuse philosophie en milliards d’euros sonnants et trébuchants, 17 milliards exactement si les calculs du ministre du budget sont exacts, 17 milliards qu’il va falloir financer par … heu, par des impôts supplémentaires pris aux catégories toujours priées de payer pour les autres au nom de la justice sociale et solidaire, c’est-à-dire les « riches » et les entreprises ?

Dans la foulée, n’a-t-il pas abandonné prestement toute velléité de réformer en profondeur notre fonction publique décontractée et pléthorique, préférant de beaucoup annoncer la création de maisons « France Services publics » sur tout le territoire, quitte à laisser tomber sa minuscule ambition de campagne de réduire les effectifs de fonctionnaires de 120 000 personnes sur 5,7 millions ?

N’a-t-il pas finalement donné tous les gages possibles à la fibre amoureusement étatiste des Français ? Ceux-ci parlent toujours de liberté avec des trémolos dans la voix, mais à choisir, ils préfèrent encore que l’Etat, réputé omniscient et moralement infaillible, s’occupe de tout.

Et là encore, Emmanuel Macron n’a-t-il pas fait récemment la preuve que rien ne sera jamais trop trivial pour son gouvernement définitivement converti à jouer les nounous empressées auprès des Français ? C’est ainsi que les ministres sont dorénavant priés de songer aux petits déjeuners des enfants dans les écoles maternelles et primaires en lieu et place de leurs parents ; c’est ainsi qu’ils doivent également veiller à organiser convenablement les salles de bain des personnes âgées.

Mon surmoi libéral aurait tendance à penser que si le gouvernement s’occupait prioritairement de faire en sorte que chacun puisse gagner sa vie par son travail et subvenir ainsi à ses besoins et à ceux de sa famille ou, plus exactement, s’il arrêtait de mettre toujours plus de bâtons réglementaires et fiscaux dans les roues des entreprises et des investisseurs au nom d’une justice sociale et sociétale douteuse, il n’aurait pas besoin de se substituer aux choix des individus pour tout et n’importe quoi.

Mais il semblerait que contrairement à nos voisins néerlandais et allemands, nous autres Français professions une nette préférence pour des citoyens pauvres ou au chômage, mais – attention, exception française ! – largement protégés et indemnisés par une batterie d’allocations financées par l’impôt redistribué, plutôt que rémunérés et responsabilisés par leur propre travail. Fin du surmoi libéral.

Il est vrai que lorsqu’Emmanuel Macron est arrivé tout fringant sur la scène présidentielle, il tenait d’inquiétants discours sur le fait de vouloir « en même temps » protéger et… – attention, horreur économique à l’état pur – libérer ! Il est même parvenu à mettre fin au recrutement au statut des cheminots à partir de 2020 et à fusionner les instances représentatives du personnel en un seul comité au sein des entreprises. De quoi dénaturer totalement les valeurs éternelles de la France !

Dieu merci, ainsi que l’affirmait récemment Marlène Schiappa, la page « libérer » est heureusement et définitivement tournée :

« Au gouvernement, on est nombreuses et nombreux à être mobilisés pour aller plus loin dans les mesures de protection maintenant qu’on a libéré. » Le Grand Jury RTL-LCI-Le Figaro, 3 mars 2019.

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Depuis, Emmanuel Macron ne ménage pas ses efforts pour sublimer l’exception française dans tous les domaines imaginables. Il est donc des plus étranges que les Français ne lui soient pas plus reconnaissants de le voir déterminé à rebâtir la France à l’identique ultra-keynésien de ce qu’elle est depuis plus de quarante ans.

Peut-être l’explication vient-elle de ce que lui-même et ses ministres persistent à dire que les comptes de la nation seront tenus, répandant ainsi une fausse impression d’austérité. Or si l’on pose par principe que la France n’est pas un pays comme les autres, il n’y a plus aucune raison de se morfondre devant une ribambelle de grandeurs économiques – chômage, dépenses publiques, impôts – plus élevées que partout ailleurs : les riches et les entreprises paieront !

Et moi, je m’autorise encore un petit sursaut de surmoi libéral : ça promet !


Pour compléter ce petit panorama consacré au « cap » d’Emmanuel Macron après deux ans à la tête de l’Etat, je suggère la lecture de « Il y a un an, Emmanuel Macron devenait Président » (7 mai 2018) et celle de « Macron : à pieds joints dans les charentaises étatiques de Chirac » (27 avril 2019).


Illustration de couverture : Il y a deux ans, le 7 mai 2017, Emmanuel Macron devenait le 8ème Président de la Vème République française.

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