Droit de vote : Aymeric Caron nous prendrait-il pour des animaux ?

Aymeric Caron et Jean-Luc Mélenchon n’ont pas toujours été les meilleurs amis du monde. En 2014, quand il était chroniqueur dans l’émission On n’est pas couché, le premier reprochait au second de passer son temps à glander sur les bancs du Parlement européen et le second l’accusait en retour d’être un « branleur » agitant n’importe quelle rumeur pour faire son show.

En 2017, timide rapprochement. Le patron de la France insoumise ayant reconnu le caractère « révolutionnaire » du véganisme, Caron lui accorde le bénéfice du doute mais garde ses distances. Il faut dire que le journaliste est non seulement végan, luttant à ce titre contre « la mort imposée dans les assiettes », mais furieusement antispéciste, ce qui signifie qu’il milite avec acharnement pour la « libération animale » et la reconnaissance de l’égalité entre l’homme et l’animal. Dans ces conditions, impossible d’emboîter le pas à qui ne dénonce pas franchement la souffrance animale dans toutes ses modalités : 

« Le refus de Mélenchon de condamner la corrida et la présence d’animaux dans les cirques m’a définitivement convaincu de m’abstenir de lui donner ma voix. »

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En janvier 2022, nouveau son de cloche. Ainsi va la vie en politique. Aymeric Caron en est venu à considérer que la radicalité écologique qu’il appelle de ses vœux n’est plus du tout du côté des Verts format Jadot, trop mous, trop Medef, trop croissants à son goût – une simple écologie d’ajustements, alors qu’il faudrait « tout repenser ». Dorénavant, la seule candidature « porteuse d’espoir » à ses yeux se situe chez Mélenchon. D’où ralliement, flagornerie… et ferme intention de se présenter aux législatives de juin.

Mission accomplie : depuis cette semaine, Aymeric Caron est officiellement candidat de la Nouvelle Union populaire écologique et sociale dans la 18è circonscription de Paris. Une Union populaire dont l’aspect unioniste consiste à absorber les petits débris de la gauche comme le PCF, le PS et les Verts dans l’orbite de la France insoumise. Ces mêmes Verts qu’il jugeait écologiquement timorés mais qui se retrouvent finalement sous la même bannière que lui. Mais peut-être faudrait-il plutôt parler de gamelle commune.

Toujours est-il que M. Caron va effectivement se soumettre au vote d’une bonne partie de ses concitoyens.

A-t-il conscience que s’il est élu, ce sera peut-être aussi grâce aux voix d’individus « incultes et irresponsables » ? À moins qu’il ne considère que seuls les votants les plus éveillés à la justice sociale mélenchonienne, à l’écologie radicale et aux droits des animaux lui accorderont leurs suffrages conscientisés et responsables, tandis que les autres, en bons déficients mentaux qu’ils sont, iront tout naturellement, tout bêtement, vers les candidats des partis de droite et d’extrême-droite ? (Et pour lui, la droite commence à LREM, bien évidemment).

Il faut dire que l’annonce de sa candidature a fait remonter à la surface des propos qu’il avait tenus en 2017 à propos du droit de vote. Tout comme il existe un permis de conduire, tout comme il faut réussir des concours ou des examens pour devenir médecin ou avocat, Aymeric Caron préconise d’instaurer un « permis de voter » sous la forme d’un petit QCM destiné à vérifier à chaque scrutin que nous possédons bien les connaissances liées à l’enjeu du moment :

Le parallèle entre le citoyen qui vote et l’expert de tel ou tel champ de connaissance, ce parallèle qui semble rendre le permis de voter complètement naturel dans notre société, relève d’une fausse logique. Oui, il faut s’instruire pour devenir médecin, avocat, ingénieur, etc. Oui, il faut acquérir des savoirs et du savoir-faire. Mais en démocratie, autant l’on ne naît pas médecin, autant l’on naît citoyen d’un lieu ou d’un autre. Il n’est pas interdit de s’intéresser à la politique et aux sujets de société du moment, mais c’est le simple fait de vivre dans ladite société qui nous donne voix au chapitre, indépendamment de notre position sur l’échelle des connaissances.

Dieu sait que M. Caron n’est jamais le dernier à dénoncer et débusquer le fascisme partout où il se trouve, au nom de la liberté et de la démocratie. On le suivrait volontiers s’il n’était évident qu’il est une liberté qui lui répugne particulièrement, celle des idées et des opinions. Ce n’est pas tant le niveau culturel et éducatif des votants qui le préoccupe – niveau dont on pensait d’ailleurs qu’il relevait au départ de notre fabuleuse Éducation nationale et de ses brillants diplômes largement répandus dans la société. C’est plutôt le désir impérieux de voir tout le monde se rallier à ses idées qui motive ses curieuses envies de sélection.

Oh, bien sûr, interrogé à ce sujet hier matin au micro de Sud Radio, Aymeric Caron s’est empressé de faire savoir que la plateforme programmatique qui le liait dorénavant à l’Union populaire n’incluait pas son petit examen d’accès au droit de vote. Mais, a-t-il ajouté, ce système existe déjà puisqu’il faut avoir dix-huit ans pour voter. Or que signifie le critère de l’âge si ce n’est l’accès à un certain niveau de maturité et de connaissances ? Un jour, il faudra repenser tout cela, voilà tout. Nous sommes prévenus.

En réalité, nous savons depuis un bon moment que l’apostolat antispéciste d’Aymeric Caron vire non pas à l’aimable utopie, mais à l’absurdie la plus inquiétante. L’ancien journaliste milite en effet pour la constitution d’une « biodémocratie » dans laquelle, à côté de l’Assemblée nationale, le Sénat serait remplacé par une « Assemblée naturelle » où siégeraient des experts du règne animal afin de représenter les intérêts des animaux.

Dans cette perspective, le permis de voter n’est jamais qu’un moyen de calibrer le corps électoral afin d’obtenir in fine une Assemblée nationale d’experts représentant les intérêts des humains, en parfaite harmonie avec son idéologie délirante et autoritaire. Car bien sûr, comme leurs congénères animaux, la plupart des humains sauf lui-même et quelques heureux élus triés sur le volet n’ont pas les ressources intellectuelles suffisantes pour savoir ce qui est bon pour eux.

Manifestement obnubilé par une forme aggravée de biomimétisme politique, à moins qu’il ne s’agisse d’animalocentrisme sociétal, Aymeric Caron nous prend assurément pour de pauvres petits animaux sans défense et se verrait bien berger. Ça promet.


Illustration de couverture : Aymeric Caron explique son ralliement à Jean-Luc Mélenchon. Émission Face à Baba sur C8, janvier 2022. Capture d’écran.

19 réflexions sur “Droit de vote : Aymeric Caron nous prendrait-il pour des animaux ?

  1. C’est marrant, il existe un livre mélange politique et « spécisme » : La ferme des animaux.
    Plutôt qu’en berger, Caron se verrait bien en « Napoléon »

  2. Ce qui me terrifie est de savoir que le commissaire du peuple va peut-être se voir attribuer quelque responsabilité, dans un peu plus d’un mois.

    Je crois que beaucoup ne se rendent pas compte du danger absolu que représente ce type.

    En comparaison, Macron est Soeur Félicie du Couvent des Oiseaux.

    Alors Caron, savez-vous …..

  3. Ce type est un fanatique dangereux. Il est de l’étoffe dont on fait les Pol Pot.

    Remarquez que son délire consistant à vouloir faire voter les animaux n’est guère différent du délire communiste de papa consistant à exercer la dictature au nom du prolétariat. Dans un cas comme dans l’autre, la prétendue défense des faibles et des opprimés n’est qu’un prétexte pour tyranniser les masses. Les prolétaires ont toujours été les premières victimes du communisme.

    Dans la version d’Aymeric Caron, mettons que l’oppression serait plus élégante : il n’aurait pas besoin de massacrer les pauvres pour les défendre, contrairement à ce qu’ont dû faire Staline, Mao-Tsé-toung, Castro, etc. Il se contenterait d’exercer sur eux sa dictature, au nom de pauvres bêtes qui seraient bien en mal d’exprimer leur avis. C’est très astucieux.

    Concernant son idée d’un permis de conduire électoral, sur le papier, elle n’est pas absurde. Je suis certain qu’on peut trouver des pages très profondes là-dessus chez les plus grands philosophes de l’histoire, depuis l’Antiquité jusqu’à nos jours. La sottise et les bas instincts de la populace sont évidemment l’une des tares intrinsèques de la démocratie. On l’a bien vu avec les Gilets jaunes.

    Cependant, autant je suis à l’aise avec un Tocqueville, par exemple, analysant cette réalité, autant je suis inquiet lorsqu’un Aymeric Caron ventile ses idées de QCM électoral. Gageons que quiconque remettrait en cause la religion réchauffiste, par exemple, dans un tel questionnaire, serait jugé par l’intéressé comme n’ayant pas « l’épaisseur culturelle » suffisante. Comme il le dit dans son français de cochon, qui dit assez ce qu’il faut penser de son épaisseur culturelle à lui. Dans le genre épais, il se pose un peu là, en effet.

    • « La sottise et les bas instincts de la populace sont évidemment l’une des tares intrinsèques de la démocratie. On l’a bien vu avec les Gilets jaunes. »

      Les pôvres, les faibles, les déshérités de la vie peuvent-ils (doivent-ils) exprimer leur légitime soif de vivre plus décemment ? et comment ?

      • S’ils le peuvent, et s’ils le doivent, sont deux questions distinctes. Il serait préférable de ne pas les mélanger.

        Non, ils ne le doivent pas. Il n’y a aucune obligation à exprimer quoi que ce soit. L’expression, dans un pays libre, doit par définition rester libre. Obliger des gens à exprimer quelque chose est évidemment une détestable inclination communiste.

        Ils le peuvent, naturellement. En parlant, en écrivant. Il faut savoir écrire, pour cela, bien sûr. Donc penser à bien travailler à l’école avant de se plaindre, plus tard, qu’on est un « déshérité de la vie ».

        Surtout, ils doivent se borner à le faire légalement. Empêcher les gens de circuler est illégal. Obliger les gens à manifester leur soumission aux Gilets jaunes et à leurs idées, les menacer et les intimider dans le cas contraire, est illégal. Détruire des biens est illégal. Attaquer des personnes est illégal, même si ce sont des policiers.Tuer 10 personnes par imprudence est illégal.

        Je constate que personne ne demande des comptes aux Gilets jaunes pour ces 10 personnes qu’ils ont tuées. Tout le monde les a oubliées. En fait, personne (sauf moi, apparemment), n’a jamais écrit ces mots : les Gilets jaunes sont des meurtriers, et en tant que tels, ce sont de sale types.

        Si cela ne dépendait que de moi, je dirais que manifester est aussi illégal. En tous cas, dans les conditions où cela se fait habituellement en France.

        Dans les pays civilisés, les manifestations sont : a) exceptionnelles, b) soumises à autorisation, c) ne gênent nullement autrui, c’est à dire ne se déroulent pas dans la rue, ne bloquent pas la circulation, et bien entendu ne se soldent pas systématiquement par des destructions, des pillages et des incendies.

        Sinon, de façon générale, sur le plan moral et philosophique, je dirais non : « les pauvres, les faibles, les déshérités de la vie » ne doivent PAS exprimer leur légitime soif de vivre plus décemment. Il n’ont aucune légitimité à vivre plus décemment. Il n’est pas indécent d’être pauvre ou faible. Il n’y a pas de déshérités de la vie.

        Dire qu’il y a des déshérités de la vie revient à dire que l’état normal des choses est d’hériter de la vie, ce qui ne veut rien dire. Personne n’a droit à rien.

        Ce que « les pauvres, les faibles, les déshérités de la vie » ont la possibilité de faire (ce n’est ni un droit, ni une obligation), c’est de faire des efforts pour améliorer leur condition. Dans la mesure où c’est possible.

        Ce n’est pas toujours possible. Quelqu’un qui a 70 de quotient intellectuel ne peut pas le porter à 100. L’intelligence est héritée dans une large mesure (de 50 % à 90 %, selon les estimations). Là, du coup, le mot d’héritage se justifie. Passées les années scolaires, l’espoir d’améliorer ce chiffre se réduit à pas grand’chose.

        Et même avant. Du temps où l’on avait encore le droit d’énoncer l’évidence, et où cela n’était pas susceptible de vous conduire au tribunal, toutes les institutrices savaient détecter, dès les plus petites classes, les enfants qui réussiraient plus tard. Elles se trompaient rarement. C’est génétique.

      • @ Aliénée

        Hahaha, trop fort… et en dehors de la référence à Mein Kampf, vous auriez quelque chose d’intelligent à dire ? Vous en êtes à combien, vous ? 90 de QI ? 80 ? 70 ?

        Hitler a parlé des Gilets jaunes ? A quelle page de Mein Kampf, puisque vous semlbez l’avoir lu, contrairement à moi ?

  4. Le moustique est véritablement l’ennemi numéro 1 de l’homme car il tue à lui seul près de 750 000 personnes dans le monde chaque année. Ce n’est pas tant l’animal en soi qui tue que les virus qu’il transmet en piquant ses victimes.
    Et pourtant, Aymeric Caron répond qu’un moustique a le même droit de vivre qu’un être humain. « La femelle pique, mais il faut bien comprendre que c’est une mère qui remplit son rôle, c’est une dame qui risque sa vie pour ses enfants en devenir ».
    https://www.lepoint.fr/societe/faut-il-tuer-les-moustiques-01-08-2019-2327963_23.php

    La saison arrive, avant d’en écraser un, réfléchissez bien !
    En tout cas dans la 18e circonscription (9e et 18e arrondissement de Paris), tout contrevenant sera déporté en camp de rééducation.

    • Le moustique est une dame qui risque sa vie pour ses enfants… Ce type est un fou furieux. Sa place n’est pas à l’Assemblée nationale, mais dans un hôpital psychiatrique.

      • non pas pour ses enfants mais pour avoir les protéines nécessaires à la formation puis la ponte de ses œufs… sauf bien évidemment à considérer que ses œufs en gestation dans son abdomen sont déjà des petits moustiques !

  5. Considérer l’animal comme l’égal de l’homme c’est effectivement ramener l’homme au rang de l’animal.

    Faudra-t-il interdire aux animaux de tuer d’autres animaux?
    Faudra-t-il juger les animaux pour leurs crimes comme au moyen-âge?
    Faudra-t-il libérer les animaux des zoos?

    Il y a plein de questions à poser aux antispécistes. Ils ont des réponses rigolotes comme celle du même Aymeric Caron qui prétend se laisser piquer par les moustiques.

    Une de mes question préférées concerne le lait: si on arrête l’exploitation des animaux, il faut en pratique revenir à l’allaitement maternel pour tous les enfants jusqu’à deux ans. Peut-on être végan et féministe?

    • Oui pour la viande et les animaux d’élevage à condition de regarder la question en face et que le consommateur soit clairement informé de la vie de ces animaux dans leurs camps de Co…… Pour imaginer l’importance de l’élevage en Bretagne (4 départements) il faut se rendre compte que leurs effluents (fumiers et lisiers) est évalué à 25 millions de tonnes par an (2010) – source Bretagne environnement..

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