Qui aime l’ÉTAT aime l’ENA – et vice-versa [Replay]

Mise à jour du samedi 10 avril 2021 : Emmanuel Macron a annoncé cette semaine la suppression de l’ENA au profit d’un « Institut du service public » censé combiner excellence des formations, expérience du terrain et proximité avec les citoyens. Cette réforme sera d’un intérêt limité si elle n’est pas l’occasion d’une restructuration complète de la fonction publique dans le sens d’une limitation de la sphère de l’État dans la vie des citoyens, l’ENA étant à l’évidence la manifestation suprême de l’étatisme le plus dogmatique et fier de l’être.

Évoquant par anticipation le débat d’hier soir (4 avril 2017) entre nos prétendants présidentiels, Sophie Coignard du Point le comparait au grand oral de l’ENA (École nationale d’administration) et se prenait à espérer que les 11 partants éviteraient la langue de bois qui reste manifestement de règle chez les candidats au fameux concours, ainsi qu’en atteste la passionnante lecture du rapport de M. Thierry Bert, président des jurys du concours 2016, publié le mois dernier.

Ce rapport est avant tout clinique. Il donne des statistiques sur les candidats. Il explique comment les jurys se sont concertés au préalable pour attribuer les notations et quelle ambiance (bienveillante plutôt que déstabilisante, comme c’est mignon !) ils ont souhaité faire prévaloir, notamment pendant les épreuves orales. En seconde partie, il rend compte de façon détaillée des remarques (souvent sévères) des correcteurs sur les copies examinées épreuve par épreuve. Mais il adopte aussi parfois un ton personnel très pince-sans-rire qui n’est pas sans nous distraire hautement.

Je ne résiste pas au plaisir de vous citer un passage relatif à l’épreuve orale d’entretien, anciennement grand oral. Il semblerait que les 197 candidats admissibles aient fait preuve d’une quasi unanimité à chanter les louanges du service public et à protester de leur total dévouement envers l’intérêt général, tellement plus « noble » que les intérêts particuliers ! Réflexions de M. Bert :

« Il s’agit ici d’un jury de concours, et non d’une cérémonie religieuse. (…) Mais certains candidats sont restés fixés sur cette opposition entre le lucratif (le mal) et l’intérêt général (le bien). (…) Nul ne nie que l’État soit une superstructure très utile. (…) Mais il est tout à fait inquiétant qu’en France au XXIème siècle, on puisse encore croire qu’il a le monopole de l’intérêt général, alors que c’est toute la société qui y concourt (…). » (page 47)

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• De fait, de rapport en rapport, les jurys pointent le conformisme, le manque de sens critique, l’incapacité à prendre de la hauteur, l’absence de réflexion personnelle, parfois même la difficulté à comprendre les sujets et à utiliser les documents donnés en appui ou à échapper à leur simple paraphrase.

Les candidats ont aussi tendance à se montrer peu rigoureux sur les références qu’ils utilisent, donnant l’impression de construire des paragraphes entiers visant à placer à tout prix des citations qu’ils ont en tête mais qui ne présentent qu’un lointain rapport avec le sujet. Ou bien ils pratiquent allègrement le « name-dropping » sans explication ni discernement en faisant voisiner Zemmour avec Hume ou Locke, par exemple.

Dans la partie détaillée épreuve par épreuve du rapport 2016, les correcteurs ne sont pas tendres avec le niveau des candidats aussi bien sur le plan des connaissances que celui du raisonnement. En économie, le jury du concours externe (étudiants) note :

« Le jury considère le niveau général comme moyen, tant sur les connaissances purement économiques que sur la capacité d’analyse. » (page 23)

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Celui du concours interne (fonctionnaires) :

« La moyenne de l’épreuve se situe à 9 sur 20 et reflète un niveau général assez faible, avec une forte concentration de devoirs en-deçà de 10 sur 20. » (page 26)

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Autre exemple, les correcteurs de l’épreuve « questions sociales » du concours externe ont observés que l’épreuve semblait mal préparée :

« De grosses erreurs et confusions sur des notions de base ont en effet été fréquentes (…) À ce défaut de connaissance et de maîtrise du fond s’ajoutent des défauts de raisonnement. » (page 36)

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Signalons enfin les remarques du jury « finances publiques » du concours externe :

« Le jury a estimé qu’un nombre peu significatif de candidats avait bien compris les attentes de cette épreuve, en termes de méthode comme de programme. » (page 39)

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Si vous parcourez le document, vous conviendrez aisément que je n’ai pas sélectionné les passages les plus désobligeants par pure intention maligne.

C’est jusqu’à l’orthographe hasardeuse des candidats qui est épinglée dans l’exposé de M. Bert sur un concours considéré en France comme rassemblant ce que notre élite produit de mieux. La remarque est reprise ensuite par de nombreux correcteurs.

On constate cependant avec une triste surprise que l’ENA subit elle aussi ses petits nivellements par le bas, comme la première école primaire venue. Il a été décidé, à la « demande explicite » de M. Bert que l’orthographe ne pouvait donner lieu à des pénalités supérieures à  2 points (sauf copie incompréhensible) :

« Nous savons tous que l’orthographe a évolué et évolue continuellement (…) Nous savons aussi qu’il s’agit souvent d’un « marqueur social », et qu’il faut donc relativiser son importance si l’on veut pratiquer des recrutements innovants. » (page 3)

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Il y a vraiment de quoi s’esclaffer lorsqu’on consulte ensuite les origines sociales (parents majoritairement CSP+ et enseignants) et scolaires des candidats : la plupart des étudiants sortent de Sciences Po Paris ou d’un IEP, sinon d’HEC et ESSEC, les fonctionnaires du concours internes viennent essentiellement de Bercy tandis que les candidats du troisième concours sont issus le plus souvent des professions du conseil et de l’audit. On ne va quand même pas leur demander d’écrire correctement !

Si les difficultés orthographiques des candidats à l’ENA prêtent à rire, elles ont au moins l’avantage de montrer une fois de plus que les inégalités sociales ne sont rien dans la dégradation du niveau des élèves en comparaison de l’affaiblissement continu des programmes et des pédagogies utilisées qui affecte absolument tous les élèves, de la ZEP au concours de l’ENA.

• Rassurons-nous cependant. Si les candidats pris dans leur globalité n’impressionnent guère les correcteurs, la sélectivité est très élevée. On peut donc espérer que les 90 reçus en 2016 sont bien les représentants de la crème de la crème censée pourvoir à nos destinées au sein de toutes les administrations publiques. On sait qu’en France, on ne manque pas d’administrations publiques, lesquelles ne manquent pas d’activités amusantes pour s’occuper et se trouver « obligées » de recruter de plus en plus de fonctionnaires, dont nos merveilleux énarques.

Il existe 3 voies d’accès à l’ENA : le concours externe réservé aux étudiants titulaires d’une licence, le concours interne pour les agents ayant au moins quatre ans d’expérience dans la fonction publique, et le troisième concours, censé apporter de la diversité, ouvert aux candidats pouvant se prévaloir de huit ans d’expérience professionnelle en dehors de la fonction publique (élus, salariés du privé, syndicalistes). En 2016, ces derniers représentaient 112 inscrits pour un total de 1550.

A la fin du 5ème jour des 5 épreuves écrites, il ne restait plus que 932 candidats. Parmi eux, 197 ont été déclarés admissibles et 90 furent ensuite admis à l’issue des épreuves orales. Le taux global de réussite est donc d’environ 10 %. Il est plus sévère pour le concours externe (7 %).

• Beaucoup des critiques adressées à l’ENA portent sur l’aspect reproduction sociale que j’ai évoqué plus haut, ainsi que sur sa « parité » hommes femmes déficiente. Il n’y a toujours pas autant de filles que de garçons reçus : 35,5 % en 2016, alors que tous les espoirs semblaient permis en 2013 où le taux s’était hissé à 45 %.

Mais est-ce vraiment le problème essentiel de l’école ? Si l’on en croit les témoignages récurrents d’anciens élèves, le système du classement qui détermine l’ensemble de la carrière subséquente des élèves génère non seulement une obsession chez tous les anciens énarques, mais aussi le conformisme que les jurys d’admission déplorent tant par ailleurs.

Pour arriver dans les premières places qui ouvrent la porte des 3 corps les plus « prestigieux » (Conseil d’État, Inspection générale des finances et Cour des comptes), il n’est question que de bachotage intensif d’où sont exclues toute originalité, toute idiosyncrasie personnelle et toute prise de risque qui compromettraient les chances d’être bien noté.

Dès le concours d’entrée, les élèves savent qu’ils « doivent » aborder tel sujet sous tel angle s’ils veulent être admis. Dans le rapport de M. Bert, on lit par exemple que sur le sujet « Un monde de croissance(s) ? Selon quels indicateurs ? » (épreuve économie du concours externe) les correcteurs attendaient des candidats :

« qu’au moins un paragraphe du travail traite de la question de la remise en cause du modèle capitaliste fondé sur une croissance forte dans un monde où les ressources sont finies. »

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Ce n’est pas un mince paradoxe pour les candidats puis élèves de réaliser que toute l’originalité de pensée qu’on exige d’eux ne vaut que tant qu’elle reste dans les cadres autorisés de la haute fonction publique. Comme disait M. Bert, « nul ne nie que l’État soit une superstructure très utile. »

Dans un livre paru en 2012 et intitulé « Promotion Ubu roi. 27 mois sur les bancs de l’ENA », Olivier Saby (sorti en 2011 25ème sur 81) va encore plus loin. Il critique un enseignement qui fonctionne sur « la capacité à reproduire sans courage, à imiter, à singer. » Il dénonce des conditions de formation qui font évoluer les élèves en préfectures et ministères, au milieu de multiples avantages de fonction et très loin des réalités de la vie quotidienne des Français.

Il brocarde enfin le « vide abyssal de l’enseignement » qui est délivré par des intervenants censés être des experts dans leur domaine. Or, par exemple, Saby a reçu des cours sur l’ouverture du capital de Gaz de France par un spécialiste de la grippe aviaire qui avouait ne rien connaître au sujet du cours, cette situation « ubuesque » n’étant pas rare.

On dit généralement que l’ENA a été créée en 1945 à l’initiative du général de Gaulle pour donner une formation spécifique de qualité à tous les hauts fonctionnaires. C’est vrai. Mais il manque quelques éléments importants pour bien comprendre que cette « prestigieuse » école est le bras armé de l’étatisme le plus forcené et que ses absurdités, comprenant même des petits problèmes de déficit incroyables dans ce haut lieu de l’élite française auto-proclamée, sont complètement en phase avec l’échec qui vient imperturbablement conclure ce genre de politique.

En 1945, De Gaulle présidait (jusqu’en janvier 1946) un gouvernement provisoire qui comprenait des ministres originaires de tous les partis, y compris bon nombre de socialistes (SFIO) et communistes (PCF). L’ENA fut instituée en même temps que les grandes nationalisations de 1945 (Renault, charbonnages, électricité…) et que les bases de notre calamiteux État-providence actuel. Qui dirigeait la Mission provisoire de réforme de l’administration chargée de préparer le projet de l’école ? Qui signa les décrets fondateurs ? Qui instaura le statut de la fonction publique qui vaut encore aujourd’hui ? Maurice Thorez, ministre de la fonction publique (novembre 1945 à mai 1947) et secrétaire général du Parti communiste français.

Il est également troublant de voir que cette volonté de disposer de hauts fonctionnaires parfaitement calibrés par et pour l’État relevait de la même idée que celle qui avait présidé à la création de l’Ecole des cadres d’Uriage par le régime de Vichy en 1940 (si ce n’est que dans le contexte de la Résistance, les cadres d’Uriage ont fini par se détacher de leur créateur).

On imagine bien qu’avec une inspiration aussi collectiviste, l’ENA ne pouvait qu’instaurer un formatage de la pensée et une mainmise des hauts fonctionnaire sur la gouvernance du pays (grande entreprises privées comprises lors de pantouflages de pure connivence) avec des résultats au mieux décevants, mais plus souvent catastrophiques, comme nous le rappellent régulièrement les aventures coûteuses de notre État-stratège.

S’il vous prenait malgré tout l’envie farfelue de tester vos capacités à intégrer un organisme aussi furieusement français que dramatiquement prétentieux, vous avez jusqu’au jeudi 13 avril prochain pour vous inscrire au concours 2017 de l’ENA !


Illustration de couverture : La façade parisienne de l’ENA (avenue de l’Observatoire). La majorité des activités de l’école ont été transférées à Strasbourg en 2005 selon un projet (coûteux !) de décentralisation et de rapprochement symbolique avec les instances européennes initié en 1991 par Edith Cresson.

14 réflexions sur “Qui aime l’ÉTAT aime l’ENA – et vice-versa [Replay]

  1. C’est pour cela, qu’en plus des prisons, dont tout le monde connait le nombre de « bénéficiaires étrangers », il faudrait vider les Hautes Écoles de l’État français . Et comme Hercule, puisque le nettoyage des écuries avait la 9 ème position, je pencherai qu’en nos temps tourmentés, pour sauver le peuple de France et de Navarre, et surtout les femmes et les jeunes filles et les fillettes françaises de souche, il faudrait créer le 13 ème travaux qui consisterait à débarrasser les écoles de la ripouxblique socialiste universellement fausse et égalitairement injuste, de tous les imans du socialisme mondialisé bruxellois sous influence pétromonarchique.
    Et ainsi, peut-être aurions nous, la vraie parité pour la gente féminine dans ce haut lieu de l’élaboration des « zélites » de l’Etat socialiste tant que cela l’arrange.
    Il faut supprimer le socialisme « Maintenant », afin de sauver « la moitié du Monde » , c’est à dire les françaises et leurs enfants. Mais les hommes préfèreront toujours leurs promotions et leurs « soumissions ».

  2. L’ENA est un moyen de former et pas une finalité universelle et supra élitiste. Si l’Etat était limité au régalien, l’ENA le serait aussi et du coup il aurait moins d’élèves pas autant d’égarements aussi catastrophiques.

    • Ah, mais je suis d’accord. Les projets de supprimer l’ENA sont clairement insuffisants, car il y a fort à parier que ce serait remplacé par d’autres choses très similaires dans l’esprit. Ils ne peuvent qu’aller de pair avec un repli du premier fauteur de trouble 🙂

  3. Comme chacun sait Michel Debré est le fondateur de l’ENA sous l’autorité du Général De Gaulle.
    L’annecdote qui suit est absolument authentique.
    Michel Debré fondateur de l’ENA sur un aéroport de la corne de l’Afrique il y a un nombre certain de décennies… Pendant qu’ils marchaient sur le tarmac Debré demanda à mon père ce qu’il pensait des 2 stagiaires de l’ENA qu’il lui avait envoyés 3 mois plus tôt. A la vue de la moue de mon père Debré s’exclama « je vais te dire, la plus grande connerie que j’ai faite de toute ma carrière est la création de l’ENA ». Vous voyez, la prise de conscience du problème de l’ENA n’est pas nouvelle et même Debré savait qu’il était un peu un docteur Frankenstein…

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  5. Allons, un libéral à l’ENA, c’est comme un athée au Vatican, ça ne peut pas exister.

    Il est inquiétant de voir les élites ne plus savoir écrire et manier la langue, c’est le signe que le déclin est bien entamé.

  6. Les deux réussites archétypales de l’ENA : François Hollande et Ségolène Royal.
    François Hollande (ENA + HEC), son déballage, 51 entrevues, donc pas un impair dû à la fatigue, avec les 2 journalistes du Monde auprès de qui il défoule toute l’étendue de sa médiocrité.
    Ségolène Royal, son verbiage. A un tel niveau, ça devient de la virtuosité.

    La faillite du Poitou-Charentes, audit Ernst&Young, ne la retient pas d’ambitionner de se recaser à l’ONU, prendre la direction du PNUD, Programme des Nations Unies pour le Développement.
    http://www.lemonde.fr/politique/article/2016/04/08/poitou-charentes-segolene-royal-scandalisee-par-un-audit-de-la-gestion-de-l-ancienne-region_4898689_823448.html

  7. Ce monsieur Thierry Bert m’a l’air d’être salement subversif. Limite ultra-libéral. Sinon, des « recrutements innovants », ça veut dire des Noirs et des Arabes, je suppose ?

    • @ Robert Marchenoir :

      Bonjour Monsieur,

      Thierry Bert est ancien élève de Normale Sup’, agrégé de lettres classiques et Inspecteur général des finances… Il est sorti major de l’ENA et il rappelle qu’il est le neveu de Raymond Barre : vous en apprendrez plus en lisant l’article que Les Échos lui ont consacré sous l’adresse suivante :
       » https://www.lesechos.fr/10/03/2008/LesEchos/20127-083-ECH_thierry-bert.htm « .
      Pour reprendre espoir dans la nature humaine, je vous suggère de vous intéresser à un autre Bert, François Bert : ancien élève de Saint-Cyr et officier de la Légion étrangère où il a progressé jusqu’au grade de Capitaine, il a rejoint le privé pour compléter sa formation avec un diplôme de Gestion de patrimoine puis a créé son entreprise Edelweiss RH dont je vous recommande la lecture du site qui est rafraîchissant et nous change des poncifs usuels d’entreprise, surtout dans la présentation de la nature de ses interventions, dites de « RH ».
      Il a co-fondé le Think-Tank Finance For Entrepreneurs.
      Enfin et surtout, il vient de publier un livre ( » Le temps des chefs est venu: Autopsie de la personnalité présidentielle & solutions pour l’avenir ») dont le titre est en soi une négation des travers de l’État non libéral tels que nous les donne à exécrer Bert Thierry quand on lit sa prose administrative.

      Cordialement.

  8. Il y a quelques années, le journaliste Philippe Meyer avait déjà pointé du doigt avec humour le conformisme effréné des candidats à l’ENA.
    Une réforme capitale pour l’avenir serait de réformer cette institution. Si je suis prêt à admettre que gérer l’administration et les grands corps de l’Etat constitue un exercice particulier qui mérite une formation spécifique, je ne vois pas l’intérêt d’une école commune pour TOUS ces corps. Une école par grand ministère régalien limiterait le coté réseau. Par ailleurs, il faut choisir son camps, soit on choisit de se consacrer à l’administration, soit on fait de la politique, soit on travaille dans une entreprise privée. On ne peut pas admettre les aller-retour, le pantouflage devrait être synonyme de démission, tout comme briguer un mandat électif.

    • On pourrait même imaginer que des écoles ou des universités indépendantes aient des filières comprenant l’administration du régalien ou que des écoles de droit aient des options administration publique sans que ce soit directement rattaché à des ministères sauf par le fait que des élèves se présenteraient aux différents concours.

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