Edition week-end : I. Il fait froid !

23 janvier 2019 :  Il neige, il fait froid, l’hiver revient ! Et avec lui cette idée que « Les vagues de froid polaire sont bien liées au réchauffement de la planète » ainsi que nous en informe le Figaro qui nous ressort un article de décembre 2017 (photo). Mais pas de panique ! Quand on lit l’article jusqu’au bout, on apprend que « pour l’heure, les études ne sont pas toutes convergentes. Cela confirme la nécessité de poursuivre les recherches en la matière. » Eh bien, en attendant que les recherches se poursuivent, voici le petit article amusé que j’écrivais il y a deux ans dans les mêmes teRRRRibles circonstances !

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C’est scandaleux, nous sommes en janvier et il fait froid ! Hier, j’ai dû passer 20 minutes à réchauffer le moteur de ma voiture au sèche-cheveux pour qu’elle consente enfin à démarrer, et ce matin encore, nous avons du – 6 °C à Lille. Le pic de chaleur promis en milieu de journée n’excédera pas + 3 °C. Ce genre de chose ne devait plus arriver. Encore un échec du quinquennat Hollande ! Encore des promesses non tenues !

On nous avait dit qu’il n’y avait plus de saison, que les émissions de CO2 de nos voitures et de nos industries réchauffaient dangereusement la planète, que nous entrions dans l’ère d’un été éternel et meurtrier, que la banquise fondait à vue d’oeil, que les ours blancs dépérissaient, que les îles des mers du sud disparaissaient sous les flots.

Et on nous avait dit qu’on ne pourrait jamais revenir en arrière, qu’on ne pourrait jamais retrouver les neiges d’antan, sauf peut-être – et encore rien n’est moins sûr, car on parle d’une catastrophe climatique extrême, sauf donc à faire des efforts considérables, c’est-à-dire suivre un chemin de rédemption révélé par la COP21, baptisé « transition énergétique » – et mis en bonnes œuvres par une flopée de taxes et d’interdictions.

Et voilà que contre toute attente il se met à faire froid en janvier. La belle affaire ! aurait dit ma chère grand-mère, c’est l’hiver ! Et pourtant, à lire tous les articles dont les médias nous inondent à propos du froid polaire qui s’est abattu sur nos douces contrées depuis une semaine ne croirait-on pas que nous vivons une situation inédite, une anomalie colossale qui nous fait revenir à des temps aussi reculés qu’oubliés, février 2012 par exemple ?

Côté France, nous sommes en pleine primaire de gauche. Mais il importe surtout d’informer les Français que les services de l’équipement s’organisent au mieux pour leur assurer une voirie en parfait état de circulation et qu’ils ne reculerons devant aucun effort pour venir à bout de ces décimètres de neige effrontément accumulés sur les chaussées. C’est gentil à eux et je suis la première à admirer tout le dévouement citoyen dont les agents municipaux font preuve en ces circonstances difficiles, mais finalement, n’est-ce pas un petit peu leur job aussi ?

A l’international, nous sommes dans la semaine où Theresa May nous a expliqué son idée du Brexit, où Xi Jinping a donné son avis enthousiaste sur le libre-échange et où Donald Trump a accédé officiellement à la Maison Blanche. Mais laissons ces sujets mineurs, se sont dit nos journaux, et faisons vraiment notre travail d’éducation des populations plongées dans un désarroi profond par… le retour impromptu de l’hiver en hiver : expliquons-leur par le menu tout ce qu’elles doivent faire pour se protéger du froid.

Et là, je vais certainement vous étonner, mais figurez-vous que quand il fait froid, il faut bien se couvrir ! Il faut mettre des gants, un bonnet et une écharpe, et il faut porter des chaussures anti-dérapantes qui maintiennent les pieds au chaud ! Je n’ose imaginer comment je me serais vêtue cette semaine si je n’avais pris quelques secondes pour lire les précieux conseils du Point ou du Figaro. Et grâce au Huffington Post, je vais pouvoir apprendre à me tricoter une « couverture météo » pour la prochaine vague de froid !

Tout ce froid complètement inattendu a aussi la mauvaise grâce de tomber assez mal. Qui dit froid dit chauffage et qui dit chauffage dit besoin en énergie, notamment en électricité. Or sur nos 58 réacteurs nucléaires, 12 ont été arrêtés depuis octobre 2016 pour des opérations de maintenance demandées par l’Autorité de sûreté nucléaire (ASN).

Pas de panique, les énergies renouvelables sont là pour combler les manques, c’est du moins ce dont nous assure régulièrement Ségolène Royal. En réalité, elles ne représentent jamais qu’un très petit 5 % de la production électrique, et encore, en visant bien selon les moments de la journée. Aussi, compte tenu de la situation tendue que la vague de froid a provoquée sur le réseau électrique, l’ASN a autorisé le 12 janvier le redémarrage de 9 réacteurs et la presse y va à nouveau de ses petits conseils pratiques du style : « Vague de froid : pourquoi faire sa machine la nuit, c’est du sérieux. »

Et pourquoi pas « vivre dans le noir et sans chauffage » pendant qu’on y est ? Car si le Nouvel Obs nous incite à adopter une attitude « citoyenne » pour éviter les coupures d’électricité, il ne manque pas de préciser que c’est bien aussi pour notre empreinte carbone, cette fameuse empreinte carbone qui est responsable du réchauffement climatique. Est-ce à dire que lorsque les températures descendent il faut continuer à lutter contre le réchauffement climatique ?

Eh bien, oui ! Il serait naïf de penser que tout ce froid fait plaisir à nos réchauffistes ! On se tromperait beaucoup en s’imaginant qu’ils sont soulagés de constater que les températures sont capables de baisser dans des proportions tout à fait conformes à ce qu’on appelle hiver. Car le réchauffement climatique anthropique a ceci de formidable qu’il se produit toujours, partout, quoi qu’il arrive.

S’il est assez facile de maintenir l’opinion publique en alerte lorsqu’il fait chaud, c’est un peu plus compliqué lorsqu’elle grelotte. La série d’hivers rigoureux des années 2009 à 2012 a plongé les climatologues dans le désespoir, mais ils ont vite trouvé la parade sous la forme d’une nouvelle théorie connue sous le nom de « Warm Arctic, cold continent. » Comme le titrait Libération à l’époque, nous avons « des hivers plus froids parce qu’il fait plus chaud. » Il fallait y penser.

Alors d’accord, il fait froid, mais ce n’est qu’une ruse du réchauffement climatique. N’ayons garde de l’oublier et continuons la lutte, camarades.


neige-a-nancy-le-16-janvier-2017Illustration de couverture : Abondantes chutes de neige à Nancy le lundi 16 janvier 2017 – Photo : PQR / L’Est républicain / MAXPP.

16 réflexions sur “Edition week-end : I. Il fait froid !

  1. Quand on voit que France 2 a viré un de ses journalistes pour un livre qui n’était pas assez climato-correct, tout est dit.
    Et dire que je suis obligé de payer une redevance pour financer ce cirque…

  2. Une vague de froid qui met à mal les affirmations alerto climatiques de nos camarades de la gauche écolo anti croissance et mondialisation, qui de surcroit tombe au moment des primaires de gauche ? pas de doûte, le froid est bel et bien de droite !

  3. Les appels à la modération énergétique sont proprement scandaleux.
    C’est la première étape officiellement connue, en France, de décroissance avérée.
    Il faudra s’attendre, les prochains hivers, et pas forcément plus rigoureux que celui-ci, à des coupures de courant. Habituer les gens à devoir moins utiliser l’électricité est un pré-requis pour leur faire accepter la perte de vitesse de notre puissance énergétique passée.
    La décroissance n’est pas un but écologique pour nos élites, mais une manière de masquer notre sous-développement en « progression ».

  4. Et t’as du avoir du -10°C ce matin dans le chnord !
    A noter que certains medias ont subrepticement inclus l’hydraulique dans les énergies renouvelables pour annoncer que les renouvelables frôlaient les 7%… sauf que dans ces 7% il y a les 6.3% de l’hydraulique dont la puissance installée varie peu d’année en année.

    En 2015 l’éolien + le solaire c’est 0.6% de la production et 15% de la facture.
    On mélange allègrement les puissances installées en kW et la production d’énergie en kWh. Le groupe électrogène au fond de mon garage sous quelques cartons c’est de la puissance installée mais ça ne produit rien.

    https://www.edf.fr/groupe-edf/information-sur-l-origine-de-l-electricite-fournie-par-edf

    • Bonjour Sam,
      En effet, la prise en compte de l’hydraulique est une vulgaire magouille pour nous faire avaler les éoliennes.
      Mais vous m’avez fait douter sur mes 5 %. Je me suis basée sur ce lien qui donne la production instantanée :
      http://www.rte-france.com/fr/eco2mix/eco2mix-mix-energetique
      Selon les moments de la journée, on est en dessous ou un peu au-dessus de 5 %. Au moment où j’écris c’est 5 % en ajoutant solaire, éolien et bio. Mais 3 secondes avant c’était 2 %. La réalité est certainement en-dessous de mon généreux 5 %, chiffre que j’ai retenu car il était cohérent avec ce qu’on disait dans l’article : https://leblogdenathaliemp.com/2016/01/14/une-autre-ecologie-est-possible-vi-et-le-nucleaire/
      Mais c’était basé sur les données RTE de 2014.

      • Merci de ta réponse.
        Sur ton premier lien j’ai étendu la production sur la totalité du mois de décembre 2016 (en étendant la sélection dans le calendrier) et on arrive pour l’éolien à 1% sur le graphique et c’est évidemment un arrondi puisque la puissance moyenne délivrée par l’éolien est de 490MW sur un total de 74072 MW et on est bien à 0.66%.
        On notera que RTE participe à l’enfumage général en parlant de puissance moyenne au lieu d’énergie. On ne consomme pas des puissances moyennes. Une famille de 4 personnes consomme environ 8000kWh d’énergie par an et ramené à une puissance moyenne ça donnerait 8000/365/24=0.9kW… pas de quoi faire tourner l’aspirateur (1,4kW) !

        Mais ça permet de dire que tel jour à 4h30 du matin l’éolien a fourni plus de 15% de la puissance distribué sur le réseau ! (véridique, lu sur le figaro)

        Il est fort possible que l’éolien dépasse « en moyenne » 3% de la consommation sur une journée voire une année mais c’est parce que cette énergie est prioritaire pour la consommation sur le réseau et que l’on met en stand by pendant 2 ou 3 heures les autres énergies, ce qui ne fait qu’augmenter le coût de ces dernières vu que ce n’est qu’une mise en veille temporaire et qu’il faut continuer à payer le personnel et les charges fixes et les amortissements… sans rien produire. Un peu comme des trains opérationnels qu’on laisserait sur des voies de garage…

        Pas étonnant que le facteur de charge des centrales nucléaires diminue d’année en année, ce n’est pas à cause de temps de maintenance ou d’indisponibilité trop long… mais à cause du stand-by et forcément ça augmente le coût du MWh produit par le nucléaire… et ça sera de pire en pire…

      • @ Sam : Je vois qu’on a fait les mêmes petites manips sur le site de RTE ! Du coup j’ai un petit peu atténué ma phrase.
        Et le coup de « l’éolien a fourni plus de 15% de la puissance distribuée tel jour à 4 h du mat » est très amusant, c’est une ficelle très employée. C’est un peu comme l’élève à qui on demande : et les maths, ça va ? Heu oui, j’ai eu 20 en note de participation. Et en DS ? Heu là j’ai plutôt 5.

  5. L’exagération fait partie de notre monde de communication et on transforme un froid, certes rigoureux mais sans rien d’exceptionnel, en catastrophe climatique qui occupe les media des heures et des heures en reportages insipides !
    Une phrase du texte de Nathalie me choque : « compte tenu de la situation tendue que la vague de froid a provoquée sur le réseau électrique, l’ASN a autorisé le 12 janvier le redémarrage de 9 réacteurs ». J’espère que l’ASN ne regarde pas le thermomètre pour donner ou refuser une autorisation de fonctionnement d’un réacteur ! L’ASN est un organisme scientifique indépendant sous la tutelle du Premier Ministre et ses avis ne font référence qu’à des données scientifiques sans avoir à se préoccuper du bilan financier d’EDF ou du bien être des citoyens pour regarder la télé ou chauffer leurs demeures. Du moins, je l’espère !

    • Bonjour Abbe,
      Le programme des contrôles a bien été modifié à la demande d’EDF appuyé par le ministère de l’énergie pour faire face à la vague de froid. Cette source est peut-être plus claire :
      http://www.lavoixdunord.fr/105278/article/2017-01-18/edf-autorise-reporter-l-arret-pour-controles-d-un-second-reacteur.
      Mais il semblerait que les contrôles déjà effectués donnent des « résultats plutôt positifs » sur le parc.
      Raison de cette vaste campagne de contrôle (Le Monde) :
      « Le fond de certains générateurs présente, en effet, des concentrations (« ségrégations ») excessives de carbone susceptibles d’en fragiliser l’acier. (…)
      Ce défaut de ségrégation avait d’abord été mis en évidence sur la cuve de l’EPR de Flamanville (Manche), forgée par Areva dans son usine de Creusot Forge (Saône-et-Loire). Cette découverte avait conduit l’ASN à exiger d’autres contrôles, sur les réacteurs en service cette fois. »

  6. Sur le plan technique, il est certain qu’on sait exactement à quoi s’en tenir. Sur le plan économique et financier c’est beaucoup moins sûr. A-t-on les moyens d’entretenir correctement nos centrales avec EDF et AREVA en faillite chronique, suspendus aux contribuables c’est à dire nous ? C’est moins évident. En tout cas il y a bien un problème financier et grave en plus.
    Alors un moyen de détourner le fond du problème, c’est de donner mauvaise conscience au citoyen=contribuable. C’est la faute du réchauffement dû aux activités humaines, euh non du « changement climatique », le diagnostic a changé…je vous signale; donc il peut faire anormalement chaud ou froid…
    Attention si vous tirez trop sur les centrales parce qu’il fait froid, ça va péter !
    Et si il fait trop chaud ou trop froid, c’est aussi de votre faute !

  7. Pingback: Il fait froid mais ne mettez pas trop le chauffage : ça pollue ! | Contrepoints

  8. Les Roumains ont du vivre dans le froid pendant des décennies sous Caeucescu. Un soir de décembre 1989, ils s’en sont souvenu quand ils sont allés le débusquer dans son palais avec l’analphabète qui lui servait d’épouse.

    Nathalie : magnifique illustration de la plus délicieuse des saisons.

  9. Vous avez bien fait de « bumper » cet article. Moi aussi j’ai sauté au plafond en lisant ce titre sur le site du Figaro ! Mais je n’ai pas eu le courage de cliquer dessus. S’il fait trop froid, c’est bien la preuve que ça se réchauffe ! Si la dépense publique appauvrit les gens, c’est bien la preuve qu’il faut plus de dépense publique ! Les Shadocks au pouvoir !

    A noter que la première ligne est plus prudente : « Les grands coups de froid venus de l’Arctique sont une conséquence du changement climatique. » Bah oui, il fait plus froid, ça change. Il fait plus chaud, ça change. Le temps varie. Grande découverte.

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