@Pontifex_fr : message de soutien au Pape François

Mise à jour du dimanche 25 octobre 2015 : Les évêques réunis en synode à Rome depuis le début du mois d’octobre 2015 ont poursuivi leurs travaux sur le mariage et la famille. La question de l’accession des divorcés-remariés aux sacrements de l’eucharistie et de la réconciliation n’avait pas obtenu la majorité des deux tiers lors du précédent synode de 2014. C’est maintenant chose faite, grâce à une proposition des évêques allemands qui ont imaginé d’établir un certain nombre de critères qui permettraient aux couples accompagnés par un prêtre de se préparer et de décider de leur accès à la communion. L’autre question délicate, celle des homosexuels, est restée en suspens, les évêques ayant convenu d’y revenir plus tard.


Ce soir, ce sera la veillée pascale et demain, Pâques, la fête la plus importante des chrétiens, celle de la résurrection du Christ. Elle est tellement importante, qu’elle est fêtée tous les dimanches sans exception depuis le dimanche où, se précipitant avec des aromates pour donner au corps du Christ les soins dus aux défunts, les femmes ont trouvé le tombeau vide et rencontré un ange qui leur a dit : « Pourquoi cherchez-vous le vivant parmi les morts ? » Jésus lui-même l’avait demandé à ses apôtres au cours de son dernier repas avec eux, le jeudi de son arrestation : « Vous ferez cela en mémoire de moi. » A ce moment-là, les apôtres n’avaient pas vraiment compris ce qui se préparait et ils se sont même endormis de fatigue et de tristesse pendant que Jésus priait au Mont des Oliviers. On a tous tendance à l’endormissement. 

C’est exactement – et seulement, je l’avoue – au moment où j’ai écrit dans mon brouillon « le jeudi de son arrestation » que j’ai vraiment commencé à comprendre combien le pontificat du Pape François était précieux. Qu’a fait le Pape pour le Jeudi Saint, cette année et les précédentes ? Il a rendu visite à des prisonniers, il leur a lavé les pieds et il leur a dit : « Celui qui est au plus haut doit être au service des autres. C’est mon devoir comme prêtre et comme évêque. Je suis à votre service. Ce signe du lavement des pieds est une caresse de Jésus, qui est venu pour cela, pour servir et pour aider. » Le Pape François s’est mis résolument dans les pas du Christ. Il nous invite instamment à le suivre selon deux axes qui se recoupent et qui reviennent toujours et toujours dans ses propos : faire preuve de miséricorde, et nous décentrer afin d’être présents aux périphéries de la société.

Mon titre @Pontifex_fr, qui est l’adresse du compte twitter français du Pape, est une façon moderne de dire « Lettre de soutien au Pape François ». De quel soutien le Pape François aurait-il donc besoin ? Il jouit d’une popularité extraordinaire, y compris au pays de la laïcité névrosée(*) qu’est la France : selon un sondage Odoxa du 20 décembre 2014 pour Le Parisien, 89 % des catholiques ont une bonne opinion du Pape et 9 % une mauvaise. Parmi les pratiquants, 93 % en ont une bonne opinion, dont 48 % une « très bonne ». Les non-catholiques l’apprécient également à 88 %. Certains catholiques français se sont outrés que lors de son passage au Parlement européen de Strasbourg il n’ait pas fait une visite à la cathédrale. Je mets cela sur le compte des trop nombreuses (à mon goût) Madames Pernelle qui ne s’intéressent qu’à la forme des choses, mais qui ne représentent finalement que 7 % des pratiquants.

Dès son élection et sa première apparition aux yeux du monde, son « Buonasera » complètement simple et naturel, puis sa demande surprenante « Priez pour moi » ainsi que son mode de vie à la Maison Sainte-Marthe, dénué de l’apparat pontifical habituel, lui ont valu la bienveillance de tous les publics de cette planète. Le choix de François comme nom de Pape, en référence à Saint François d’Assise, reflète son souhait d’une « Eglise pauvre, pour les pauvres » et c’est aussi « le nom de la paix, et c’est ainsi que ce nom est venu dans (son) coeur. » Il rejoint par là le sentiment des Français qui, dans l’enquête déjà mentionnée, sont 47 % à estimer que le premier rôle du Pape consiste à oeuvrer pour la paix dans le monde.

Hormis un début de polémique sur son attitude pendant la dictature des généraux argentins dont il fut rapidement acquitté, il avait bien d’autres raisons de plaire. Il ne venait ni d’Italie, ni même d’Europe, mais d’Argentine. Il n’était pas dans les favoris de la presse spécialisée. Il ne venait pas de la curie romaine. Et par rapport à Ratzinger, tout le monde a vite compris qu’il était plus terrain que bibliothèque, plus compassionnel que féru d’orthodoxie. Et tout le monde, je pense, a fini par comprendre aussi que par rapport à Ratzinger, il prêchait exactement le même Evangile, mais avec un style et des mots différents.

Ses premières actions vinrent confirmer les espoirs aussi divers que nombreux placés en lui. Le 8 juillet 2013, en visite à Lampedusa, lieu d’accès européen de nombreux migrants, trop souvent au prix de leur vie, il fustige l’indifférence mondiale à l’égard de ces personnes en recherche de conditions de vie meilleures. Puis en septembre de la même année, à la veille d’un G20 présidé par la Russie à Saint-Pétersbourg, il appelle à une soirée de jeûne et de prière en faveur de la paix en Syrie. Un accord de désarmement interviendra du reste dans les jours suivants. Selon les termes d’un diplomate en poste à Rome, « le Pape souligne les conséquences humaines des situations. » L’enthousiasme pour François est tel que cette même année 2013, soit 8 mois après son élection comme successeur de Pierre, il est élu « Person of the Year » par Time Magazine, en raison de l’attention rapide et profonde qu’il a suscité chez les jeunes comme chez les moins jeunes, chez les croyants comme chez les non-croyants.

J’aimerais citer également l’invitation totalement originale qu’il a lancée à l’adresse des Présidents d’Israël, Shimon Peres, et de l’Autorité palestinienne, Mahmoud Abbas, afin qu’ils viennent prier pour la paix à Rome avec lui. Ce fut chose faite le 8 juin 2014 comme le montre la vidéo ci-dessous :

En réalité, Jorge Bergoglio, pour l’appeler par son vrai nom, n’est pas là par hasard. Déjà lors du précédent conclave de 2005 qui s’était prononcé pour l’élection de Benoit XVI, il avait reçu le second plus grand nombre de voix, mais n’avait pas voulu faire obstacle à l’élection du Cardinal Ratzinger. J’en déduis qu’il bénéficie depuis assez longtemps de la confiance d’un nombre important de cardinaux, et par ricochet, d’évêques.

Et pourtant, ses appels répétés à ce que l’on prie pour lui, ses déclarations sur la brièveté de son pontificat ou sur la possibilité, ouverte par Benoit XVI, d’une renonciation, me donnent à penser que la tâche qu’il s’est assignée est lourde et qu’il a bel et bien besoin de tout le soutien possible des catholiques pour aboutir.

Il semblerait que Benoit XVI ait préféré renoncer car son âge et sa santé ne lui permettaient plus de mener à bien la réforme de la Curie devenue encore plus indispensable après le scandale Vatileaks. Il s’agissait d’une fuite de documents internes révélant des actes de corruption et de mauvaise gestion du patrimoine de l’Eglise. Ces documents se sont retrouvés dans la presse italienne et l’auteur des fuites n’était autre que le majordome particulier de Benoit XVI. La lourde tâche du Pape François, ce sont en fait deux grands projets : d’abord cette fameuse réforme de la Curie romaine, mais également le Synode sur la famille.

Concernant la Curie, François a lancé les opérations dès son élection en 2013, et tout n’avance pas aussi bien qu’il pourrait le souhaiter. En plus d’un audit des affaires financières confié à une équipe internationale du cabinet EY, il a constitué un conseil de huit cardinaux extérieurs à la Curie pour réformer le gouvernement du Saint-Siège. Ceux-ci préconisent la rationalisation des douze conseils pontificaux, les dicastères (équivalent de petits ministères) qui, avec neuf congrégations (doctrine de la foi, cause des saints, culte divin..), constituent la Curie. Mais aucun chef de dicastère ne souhaite voir disparaître le sien. En conséquence, chacun tend à « faire du zèle » afin de se montrer incontournable. Les résistances sont donc très importantes, mais la meilleure chance du Pape François réside précisément dans sa grande popularité publique et dans la quasi unanimité des croyants, et des non-croyants du reste, sur l’absolue nécessité d’améliorer la gouvernance des structures vaticanes.

Les résistances ne se limitent pas à la réforme de la Curie. Les critiques concernent également le style et les manières du Pape. Plus grave, elles concernent le fond, et débordent largement le cercle des Cardinaux pour atteindre les Evêques qui sont en première ligne sur l’autre grand chantier du pontificat, celui du Synode des Evêques sur la famille qui s’est réuni une première fois en octobre 2014. Le sujet de l’accès aux sacrements pour les divorcés-remariés, ainsi que celui de l’accueil des personnes homosexuelles, n’ont pas obtenu la majorité des deux-tiers, contrairement aux souhaits du Pape. Dans une interview accordée en 2013 aux revues jésuites, il expliquait en effet :

Un jour, quelqu’un m’a demandé d’une manière provocatrice si j’approuvais l’homosexualité. Je lui ai alors répondu avec une autre question: « Dis-moi : Dieu, quand il regarde une personne homosexuelle, en approuve-t-il l’existence avec affection ou la repousse-t-il en la condamnant ? » Il faut toujours considérer la personne. 

Cette situation n’est pas définitive, le Synode devant se réunir à nouveau en octobre 2015 pour poursuivre ses travaux.

Les difficultés du Pape sont telles, que lors de ses voeux de ce dernier Noël à la Curie, il a adressé un discours particulièrement sévère aux Cardinaux, les mettant en garde contre « quinze maladies » qui sont, entre autres : coeur dur, alzheimer spirituel, schizophrénie existentielle, terrorisme du bavardage, carriérisme et exhibitionnisme. Autant dire que l’ambiance n’était pas à la fête.

Le pape François nous demande donc de prier pour lui. C’est ce que je vais faire demain, jour de Pâques, jour de Résurrection. Sans oublier tout particulièrement les chrétiens d’Orient et les jeunes étudiants kenyans chrétiens qui viennent de subir les coups mortels du terrorisme islamiste le plus cruel et le plus obscurantiste, dans le silence assourdissant de la bonne conscience occidentale.


Démission Benoit 16Comme c’est Pâques, comme c’est la Résurrection, j’aimerais finir sur une histoire amusante. Gardons à l’esprit que Benoit XVI a annoncé sa renonciation au Saint-Siège le 11 février 2013. Dans un éphéméride allemand de l’année 2013, le dessin du 10 février, reproduit ci-contre (cliquer pour agrandir), montre le Pape en train de regarder les résultats du loto à la télévision. Il se trouve qu’il a tous les numéros gagnants et il s’écrit : « Nom de Dieu, demain je démissionne ! » J’adore ce genre d’anecdote parfaitement réelle dont la probabilité d’occurrence est pratiquement nulle !


(*) Ce petit renvoi pour évoquer rapidement l’absurde et douloureuse décision de la régie publicitaire de la RATP qui a ordonné cette semaine la suppression de la mention « Pour les chrétiens d’Orient » sur les affiches du concert qui sera donné à l’Olympia en juin prochain par le groupe Les Prêtres, précisément en faveur des chrétiens d’Orient. Détails et analyses chez KozHseize et Le Parisien Libéral (tout plein de lectures intéressantes pour ce long week-end).

2 réflexions sur “@Pontifex_fr : message de soutien au Pape François

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